08. Mener une partie
Quel est votre rôle ?
Si vous êtes le meneur de jeu, alors votre boulot est un peu différent de celui des autres. Ce chapitre vous fournit des outils pour vous faciliter la tâche au cours d’une partie.
Nous avons déjà abordé le rôle du MJ dans le chapitre Les Bases, mais nous allons maintenant voir en détail ce qui rend ce rôle unique.
Début et fin d’une scène
Au cours d’une partie, une de vos responsabilités principales est de décider quand une scène commence et quand elle se termine. Cela n’a l’air de rien mais c’est en réalité primordial car cela fait de vous celui qui détermine le rythme pendant les sessions de jeu. Si vous commencez vos scènes trop tôt, l’action principale mettra du temps à arriver. Si vous ne les terminez pas assez vite, alors l’action va traîner en longueur et au final, il ne se passera pas grand-chose au cours d’une session.
Les joueurs vous aideront parfois s’ils sont impatients de se retrouver dans l’action. Mais il peut arriver aussi qu’ils aient envie de passer beaucoup de temps à papoter (à travers leurs personnages) ou en préparant la suite avec (trop de) minutie. Quand cela se produit, c’est à vous d’intervenir et, comme un bon metteur en scène, de dire « Ok, je pense qu’on a tiré tout ce qu’on pouvait de cette scène. Qu’est-ce que vous voulez faire maintenant ? »
Vous trouverez d’autres conseils pour bien commencer et terminer vos scènes dans le prochain chapitre Scènes, sessions et scénarios.
La tension est mieux que le réalisme
Dans une partie de Fate, ne vous enlisez pas en essayant de maintenir à tout prix la cohérence du monde ou en essayant de maintenir le réalisme à tout prix. Le jeu de rôle suit plutôt les règles du théâtre et de la fiction. À vous d’en tirer parti. Les moments de jeu où les PJ n’ont pas de problèmes ou pas de conflits à gérer devraient être assez rares, même si dans la réalité ils auraient besoin de plus de temps pour souffler.
Quand vous décidez de ce qui va se passer, et que la réponse la plus plausible est aussi la plus ennuyeuse, essayez de trouver autre chose de plus passionnant, même si c’est moins réaliste. Vous pourrez toujours justifier plus tard ce qui ne paraît pas plausible sur le moment.
Donnez vie au monde et aux PNJ
En tant que meneur de jeu, c’est à vous de décider comment le monde et les gens réagissent à ce que font les PJ, ainsi que de décrire l’environnement de ces PJ. Si un PJ rate complètement un jet de dé, c’est à vous de décider des conséquences. Quand un PNJ essaye d’assassiner l’ami d’un PJ, c’est à vous de savoir comment il s’y prend. Quand un PJ déambule dans un marché et s’arrête devant l’étal d’un marchand de nourriture, c’est à vous de décider quelle est la personnalité du vendeur, comment s’est passé sa journée, ce qu’il a à vendre. C’est vous qui décidez du temps qu’il fait quand les PJ arrivent enfin à sortir de cette caverne obscure.
Fort heureusement, vous ne faites pas ça à partir de rien, vous avez de nombreux outils pour vous aider à choisir ce qui est pertinent. Le procédé que nous avons décrit dans Création d’une Partie vous a permis de créer un cadre assez étendu pour la partie que vous allez jouer, sous la forme d’aspects comme les enjeux actuels et imminents, de lieux spécifiques et de PNJ avec des objectifs solides et bien définis.
Les aspects des PJ vous aident aussi à savoir comment le monde réagit à leurs actions. Comme décrit dans Aspects et points Fate, les meilleurs aspects sont à doubles tranchants. Vous pouvez facilement exploiter ce double tranchant en utilisant les contraintes s’appuyant sur les évènements. De cette manière, vous faites d’une pierre deux coups : vous ajoutez des détails et des surprises à votre monde, mais vous faites aussi en sorte que les PJ soient au centre de l’histoire que vous racontez.
Une autre facette de votre boulot consiste à faire vivre les PNJ présents dans une scène. Vous parlez et vous décidez pour eux, comme les joueurs le font pour leurs PJ, vous décidez quand ils devront lancer les dés, et vous leur appliquez alors les mêmes règles que pour les joueurs. Vos PNJ seront un peu différents des PJ, en fonction de l’importance qu’ils ont pour l’histoire.
Aidez-vous des joueurs
Vous n’avez pas besoin de faire reposer tout le poids de la création du monde sur vos seules épaules. Souvenez-vous que plus les joueurs participent à la création du monde et de l’histoire, plus leur investissement émotionnel sera grand puisque cela sera aussi leur partie, leur jeu.
Si un personnage a un aspect qui le relie à quelqu’un ou quelque chose dans le monde, faites de ce joueur votre « expert » à tout ce qui touche à cet aspect. Par exemple, si le personnage d’un joueur a Cicatrices de la Grande Guerre, demandez toujours l’avis de ce joueur quand le sujet de la Grande Guerre est abordé dans une conversation. «Tu remarques que ce sergent porte la médaille des Vétérans, ce qui est une distinction assez rare de la Grande Guerre. Que faut-il avoir fait pour avoir le droit de porter une telle médaille ? En as-tu une ?». Certains joueurs s’en remettront néanmoins à vous, et c’est bien aussi. Mais continuez tout de même à faire ce genre de demande, cela contribue à l’esprit de collaboration que nous recherchons. De même, la principale utilisation de l’action de Créer un avantage est précisément de permettre aux joueurs de rajouter des détails au monde par le biais de leur personnage. Profitez-en quand vous avez un blanc, ou simplement quand vous voulez déléguer un peu. Une bonne méthode pour le faire au cours de la partie est de répondre à une question d’un joueur qui demande une information par une autre question.
Alex : «Est-ce qu’il y a un moyen de déstabiliser ce réceptacle magique sans détruire les gens qui sont piégés à l’intérieur ?»
Amandine : «Alors, tu sais que le réceptacle utilise leur force vitale comme énergie. S’il y avait un moyen de faire ce que tu veux faire, ça pourrait ressembler à quoi ? Après tout, c’est quand même toi le spécialiste en magie ici, non ?»
Alex : «Hmm… Je pense qu’il doit exister une sorte de contre-sort, une sorte de sécurité en cas où les choses se passeraient mal.»
Amandine : «Mouais, ça me paraît plausible. Fais un jet d’Érudition pour voir si le contre-sort est accessible».
Évaluer l’utilisation des règles
Le travail du MJ consiste aussi à prendre à chaque instant des décisions à propos de ce qu’on peut faire ou pas avec les règles. Généralement, c’est à vous de dire si une action nécessite un jet de dés, quelle type d’action choisir (surmonter, attaquer, etc.) et quelle est la difficulté du jet. Dans les conflits, cela peut devenir un peu plus complexe, comme déterminer si un aspect de situation impose à un personnage de surmonter une difficulté, ou décider si un joueur justifie correctement la création d’un avantage.
C’est aussi vous qui jugez de la pertinence des invocations et des contraintes qui sont proposées en jeu, ce que nous avons décrit au chapitre Aspects et points Fate, tout en vous assurant que tout le monde autour de la table est bien sur la même longueur d’onde. En ce qui concerne les invocations, c’est assez facile. Si le joueur peut expliquer en quoi l’aspect est approprié à la situation, tout va bien. Avec les contraintes, c’est un peu plus délicat car vous devez énoncer clairement et précisément les complications que les joueurs devront subir.
Nous vous donnerons plus loin quelques astuces supplémentaires pour vous aider à bien gérer les règles et leurs applications (cf. Juger de l’utilisation des compétences et des prouesses).
Vous n’êtes pas Dieu, mais un simple animateur
Pour vous aider à appréhender votre rôle d’arbitre en ce qui concerne l’utilisation des règles, essayez de penser à vous comme le « premier parmi des gens égaux » autour de la table, plutôt que comme une autorité supérieure. Si vous n’êtes pas d’accord sur l’utilisation des règles, favorisez une courte discussion où tous peuvent intervenir plutôt qu’une décision unilatérale. Bien souvent, vous verrez que le groupe se gère tout seul : si quelqu’un propose une contrainte qui est tirée par les cheveux, il y a de bonnes chances qu’un autre joueur le lui fasse remarquer avant que vous n’ayez à le faire.
Votre boulot c’est d’avoir « le dernier mot » sur tout ce qui touche aux règles plutôt que de tout contrôler depuis votre fauteuil. Gardez ça à l’esprit.
Créer les scénarios (et presque tout le reste)
Enfin, c’est à vous d’inventer et de faire vivre tout ce que les PJ vont rencontrer ou tout ce avec quoi ils vont interagir au cours du jeu. Cela inclut bien évidemment les PNJ avec leurs compétences et leurs aspects, mais aussi les aspects des scènes, de l’environnement, des objets, de même que les dilemmes et défis qui constituent un scénario de Fate. Vous introduisez les éléments qui vont pousser votre groupe à s’investir dans l’histoire, tels les problèmes auxquels ils devront faire face, les enjeux qu’ils devront résoudre, les ennemis et tout ce qu’ils devront subir avant d’arriver à leur fin.
Nous avons consacré un chapitre entier à cette facette de votre boulot. Vous le trouverez dans Scènes, sessions et scénarios.
Que faire au cours de la création d’une partie ?
Comme mentionné dans le chapitre Création d’une partie, inventer ou décider d’un cadre est souvent une œuvre collective des joueurs et du meneur de jeu. Dès lors, le mieux que vous ayez à faire en tant que MJ au cours de ce processus de création, c’est d’être ouvert aux nouvelles idées et d’être généreux avec vos propres idées. Jouez et étoffez les propositions des autres. Plus vos joueurs auront participé à la création du cadre, plus ils s’investiront dans la partie.
Évidemment, si tout le monde est assez souple, rien ne vous empêche de donner directement une vision précise et claire du genre de partie que vous voulez mener. «Bon, alors ça va être une partie sur la Guerre Froide pendant les années 60, sauf que c’est dans un genre steampunk, avec des « méchas », ces gros robots de guerre. Ok ? Alors c’est parti !» Prenez simplement le temps de vous assurer que tout le monde accepte de partir sur cette voie. Il suffit d’un seul joueur, un peu réticent et qui n’a pas vraiment envie de jouer ça, pour gâcher une partie.
Là-bas ou ici
En parlant de mécha steampunk dans l’Union soviétique des années soixante, c’est une bonne idée de se demander à quel point vous voulez être « là-bas ». Les grands concepts sont très intéressants, mais c’est parfois difficile pour les joueurs de s’imaginer le même monde que vous. Plus vous vous éloignez de ce qui est familier, comme notre propre monde ou des mondes imaginaires mais bien connus, plus l’obstacle à surmonter par vos joueurs peut être grand. Jusqu’à quel point vous pouvez vous éloigner d’un cadre familier va dépendre de vos joueurs, c’est donc à vous de voir avec eux. Assurez-vous cependant que tout le monde est sur la même longueur d’onde que vous, et prenez le temps de vous préparer pour répondre aux inévitables questions.
L’approche opposée consiste à faire jouer « ici », dans notre monde à nous, avec peut-être une ou deux différences notables dont vous pourrez explorer les conséquences au cours de la partie. La façon la plus simple de décrire ce genre de cadre est de commencer par donner un lieu et une époque que tout le monde connaît, et ensuite de donner ces quelques changements notables. Par exemple «C’est comme le Londres actuel, sauf qu’il y a des robots un peu partout» ou «On est à Los Angeles après la Deuxième Guerre mondiale mais quelques-uns des vétérans qui sont revenus de la guerre ont des supers-pouvoirs».
Du bas vers le haut ou du haut vers le bas
Il faut aussi que vous vous posiez la question de savoir quelle sera l’échelle de votre partie. Certains aiment bien commencer en s’intéressant à la situation dans son ensemble et en peaufinant ensuite les détails alors que d’autres préfèrent s’intéresser à ce qui se passe ici et maintenant pour développer ensuite une vue plus globale de la situation. Ces manières de faire sont respectivement appelées « du haut vers le bas » et « du bas vers le haut ». Les deux approches se valent, elles ont chacune des inconvénients et des avantages.
Si vous allez du haut vers le bas, vous décrivez l’essentiel du cadre à l’avance. Qui sont les gens qui comptent et qui ont de l’influence, quelles sont les grandes villes, quelles sont les grandes organisations présentes, etc. Cela vous donne l’avantage de voir comment s’agence le monde. Par exemple, si vous décidez que le royaume de Talua est le siège d’un conflit permanent entre cinq grandes Maisons qui se battent pour son contrôle, alors vous savez dès à présent que les grands du royaume vont appartenir à une de ces Maisons, et qu’il vous faudra une bonne explication pour ceux qui ne le sont pas.
Le désavantage, évidemment, c’est que sauf si vous faites jouer dans un monde connu (par le biais de films, de livres, de jeux vidéo ou autre) vous allez avoir beaucoup de travail avant de pouvoir vous lancer. Et vous allez aussi demander à vos joueurs d’ingurgiter une grande masse d’information, ce qui peut faire un peu peur. Mais si tout le monde est partant, cela peut faire une partie très plaisante et très gratifiante.
Si vous optez plutôt pour aller du bas vers le haut, vous pouvez ne commencer que par ce qui est immédiatement important pour les PJ. Cela peut allez de quelques PNJ notables de la ville jusqu’au nom du type qui bosse dans le bureau d’à côté. Le groupe ajoute des détails au fur et à mesure que la partie se déroule. Vous n’avez pas besoin de vous creuser la tête tout de suite pour savoir comment s’agence le monde car tout le groupe va l’imaginer au cours de la partie. Le monde se construit en partant de là où vous avez commencé.
Le désavantage de procéder de cette manière est que cela nécessite pas mal d’improvisation et d’esprit d’à propos. Et c’est valable pour tout le monde autour de la table, pour le MJ comme pour les joueurs. Pour vous, en tant que MJ, cela n’est peut-être pas un gros problème, mener une partie requiert souvent de naviguer à l’aveuglette. Mais tous les joueurs ne sont pas forcément prêts pour ce genre d’aventures. De plus, s’ils aiment bien s’immerger dans leurs personnages et voir le monde à travers leurs yeux, ils peuvent être dérangés par le fait de devoir prendre du recul pour devoir, par exemple, inventer un nom pour la hache magique qu’ils viennent juste de trouver ou imaginer ce qu’il est arrivé au dernier directeur secret de la CIA.
Le système de Fate convient aux deux méthodes, mais comme les joueurs sont encouragés à contribuer à la partie par le biais de leurs aspects et des détails sur l’histoire, la méthode du bas vers le haut peut vraiment s’exprimer pleinement. Si c’est comme ça que vous aimez jouer de toute façon, alors c’est merveilleux. Sinon, pas de problème. Mais vous pouvez quand même essayer de temps en temps pour voir.
À grande ou petite échelle
Nous avons déjà discuté de l’échelle d’une partie dans le chapitre Création d’une partie, mais cela vaut le coup d’y revenir un peu plus en détail.
Comme nous le disions précédemment, les histoires à petite échelle concernent des évènements qui sont étroitement reliés aux PJ et se déroulent probablement sur une petite surface, géographiquement parlant. Pour les histoires à grande échelle, c’est l’inverse : des intrigues épiques qui englobent des pays, des planètes, voire des galaxies, avec des conséquences qui peuvent transformer le(s) monde(s). Ces deux types d’histoires sont amusants. Recevoir le titre de Grand Empereur des Étendues Galactiques peut être aussi gratifiant que de gagner la main de la plus jolie fille du village.
Il n’y a aucune raison, par contre, pour que ces deux modes soient exclusifs. Voici quelques moyens de les combiner.
- Commencer petit et grossir : c’est l’histoire classique des héros partis de rien dans laquelle des individus sans prétention sont brusquement aspirés par des évènements dont l’envergure les dépasse. Prenons le cas de Luke Skywalker dans Star Wars : Un Nouvel Espoir. Il commence en tant que petit cultivateur, faisant de temps à autre des courses de T-16 et commettant quelques bêtises à la station Toschi. Puis, une paire de droïdes déboulent dans sa vie avec un mystère à la clef : qui est cet Obi-Wan Kenobi ? Avant même de s’en rendre compte, il trafique avec un contrebandier, sauve une princesse et frappe un grand coup pour la rébellion. C’est un cas typique d’une histoire qui commence petit et qui grossit pour atteindre des dimensions épiques.
- Montagnes russes : dans ce cas de figure, vous alternez entre des évènements à grande et à petite échelle, ces derniers étant presque des moments où l’on peut souffler un peu. En général, l’intrigue à grande échelle concerne la gestion du pays, la conquête de planètes, le bannissement d’êtres impensables qui venaient de l’au-delà, et autres histoires du même acabit. Tandis que les évènements à plus petite échelle sont d’une nature plus personnelle ayant peu ou pas de liens avec les évènements à grande échelle qui secouent le monde. Par exemple, vous pouvez passer une ou deux sessions dans des échauffourées avec le Grand Empereur puis vous concentrer sur un des personnages qui renoue avec son père ou sur un autre qui vient en aide à un ami dans le besoin. Les séances à petite échelle permettent de se poser un peu et de reprendre son souffle au milieu de toutes ces aventures épiques, et cela donne aussi l’occasion aux joueurs d’explorer plus avant certains points de vue de leurs personnages. De plus, si vous voulez créer des liens entre les intrigues à différentes échelles, vous pouvez — et les retombées pour les joueurs n’en seront que meilleures.
Avez-vous vraiment besoin des extras ?
Est-ce que le cadre dans lequel vous allez jouer nécessite des super-pouvoirs, de la magie, des gadgets high-tech ou n’importe quoi d’autre qui sort de l’ordinaire ? Que ce soit le cas ou pas, vous allez devoir penser à tout ça avant que la partie ne commence. Jetez un œil sur le chapitre sur Les extras pour en savoir plus sur eux et comment ils peuvent vous être utiles dans vos parties.
Votre rôle au cours de la partie
Une fois que vous et vos joueurs en avez terminé avec le processus de création du cadre, voyons un peu tout ce que vous avez à gérer au cours d’une session de jeu.
La règle d’or
Avant d’entrer dans les détails, voici la règle d’or de Fate :
- Décidez d’abord de ce que vous essayez d’obtenir, consultez ensuite les règles pour vous aider à le faire.
Cela peut sembler évident, mais nous voulons le mettre en avant parce que l’ordre dans lequel vous faites les choses est important. En d’autres termes, il ne faut pas voir les règles comme un carcan ou une restriction aux actions de jeu. Au contraire, utilisez-les comme des outils aux nombreux potentiels pour modéliser ce que vous êtes en train de faire. Ce que vous voulez faire, quoi que ce soit, doit prendre le pas sur la mécanique des règles.
La plupart du temps, la définition elle-même de l’action que vous voulez entamer simplifie les choses : si vous tentez de blesser quelqu’un, vous savez que c’est une attaque. Et si vous essayez d’éviter d’être blessé, alors c’est une action de défense.
Mais parfois, vous allez vous retrouver dans des situations où le type d’action à effectuer ne saute pas immédiatement aux yeux. En tant que MJ, ne réagissez pas en interdisant l’action. Essayez plutôt de trouver quel est le véritable but de cette action, vous pourrez alors y associer plus aisément une (ou plusieurs) des actions définies dans les règles.
Le corollaire de la règle d’or est le suivant : ne laissez jamais les règles se mettre en travers de ce qui fait sens d’un point de vue narratif. Si vous ou vos joueurs êtes en train de raconter quelque chose et qu’il semble alors pertinent d’utiliser une règle d’une façon qui n’est pas prévue, faites-le. L’exemple le plus courant de l’utilisation de cette règle à trait aux conséquences. Par défaut, les règles disent qu’une conséquence est quelque chose que le joueur accepte de recevoir après avoir été touché par une attaque lors d’un conflit.
Mais imaginons que vous êtes dans une scène où le joueur décide que le PJ va donner un grand coup de poing pour fracasser le dessus de cette table en verre dans le but d’intimider son interlocuteur.
Tout le monde trouve que c’est une idée géniale et du coup, ça n’intéresse personne de savoir ce qui se passerait si le PJ ratait son jet de dés. Par contre, tout le monde est d’accord pour dire que le PJ va se blesser en faisant ça (c’est ce qui rend ce geste assez intimidant).
Dès lors, il est tout à fait normal d’infliger une conséquence légère du type Des éclats de verre dans la main, parce que c’est cohérent avec la narration bien qu’il n’y a pas de conflit et que, techniquement, rien n’a attaqué le PJ. Comme pour la règle d’or, assurez-vous que tout le monde est sur la même longueur d’onde quand vous faites ce genre de choses.
Comme elle a raté un précédent jet, Cynere a déclenché par accident un piège magique mortel alors qu’elle était à la recherche de l’idole de Karlon-Kar, un ancien dieu de la destruction. Amandine explique que la pièce est constamment traversée par des éclairs de mort, de manière aléatoire et le piédestal sur lequel se trouve l’idole est situé à l’autre extrémité de cette pièce.
Lucie annonce, «Bon, ça ne fait rien. Je vais quand même aller chercher cette idole. Je commence à m’aventurer dans la pièce, en gardant les yeux bien ouverts pour repérer les éclairs de mort.
Amandine réfléchit un peu, parce qu’elle sait que des dés vont devoir être lancés. Si Cynere s’aventure dans la pièce, le mouvement ressemble à une action pour surmonter un obstacle. Mais si l’on prend en compte les éclairs de mort, on pourrait dire que Lucie tente plutôt de se défendre. Il y a aussi deux manières de gérer ce piège, techniquement, c’est juste une opposition passive pour empêcher Lucie de traverser la pièce sans heurt, mais comme le piège peut la blesser, on pourrait voir ça comme une attaque.
Amandine demande donc, «Lucie, on va lancer des dés, mais qu’est-ce que tu essayes de faire en fin de compte ? Ton but principal est d’éviter de te faire toucher par un éclair ou tu te préoccupes d’abord et avant tout d’aller récupérer cette idole ?»
Lucie n’hésite pas un instant. «Oh, l’idole, clairement.»
Amandine veut être sûre «Et tu es prête à encaisser des blessures pour y arriver ?»
Lucie répond, «Ouaip. Comme d’habitude, je prends tous les risques.»
Amandine déclare, «D’accord, alors on peut tout faire en un seul jet. Voilà comment on va gérer ça. Tu vas faire un jet d’Athlétisme contre une opposition Fantastique (+6). Si tu réussis, tu traverses le piège sans être blessée. Si tu rates, tu te retrouves un peu coincée au milieu de la pièce et tu devras refaire un autre jet pour continuer. De plus, un échec signifiera que tu as raté ton jet de défense et tu prendras donc des dommages à cause de tous ces éclairs de mort.»
Lucie grimace mais acquiesce et prépare ses dés.
Dans cet exemple, Amandine a combiné les effets d’une action de surmonter et d’une action de défense pour déterminer ce qui arrive à Cynere. Cela ne pose aucun problème parce que c’est en accord avec ce qu’elle veut faire et que c’est cohérent avec la situation décrite. Amandine aurait aussi pu décider d’avoir deux jets de dés, et cela aurait aussi été une bonne solution, mais elle voulait le faire en un seul dé.
Si vous avez un doute pendant la partie, revenez à la règle d’or et souvenez-vous que vous avez la flexibilité de faire ce dont vous avez besoin avec les règles. Mais, encore une fois, assurez-vous que tout le monde est sur la même longueur d’onde.
Quand faut-il lancer les dés ?
Ne lancer les dés que lorsque le succès ou l’échec amènent tous deux quelque chose d’intéressant à la partie.
C’est souvent assez facile à évaluer dans le cas des succès, les PJ surmontent un obstacle important, gagnent un conflit ou atteignent un but, ce qui crée du jeu pour la suite. Avec les échecs cependant, c’est un peu plus difficile parce qu’on pense d’abord à un échec en termes négatifs, on rate, on perd, on n’a pas ce qu’on veut. Si l’on ne peut rien construire après cet échec, le jeu peut rapidement se gripper et s’arrêter.
Le pire, mais vraiment le pire qui peut vous arriver c’est d’avoir un jet de dé raté et que rien ne se passe ensuite, on n’apprend rien de neuf, on ne change pas les plans en cours, la situation reste la même. C’est ennuyeux et cela n’encourage pas les joueurs à s’investir dans les échecs alors que c’est exactement le contraire dont vous avez besoin étant donné l’importance des contraintes et des concessions dans la mécanique du jeu. Cela ne doit pas arriver.
Si vous n’arrivez pas à imaginer quelque chose d’intéressant pour ces deux types de résultats, ne demandez pas à faire un jet. Si le fait de rater n’est pas intéressant, donnez simplement aux joueurs ce qu’ils voulaient ; vous aurez d’autres occasions de leur faire lancer les dés. Si c’est le succès qui est ennuyeux, essayez de voir si vous ne pouvez pas utiliser l’idée que vous avez en cas d’échec comme une contrainte, cela deviendra une opportunité pour donner quelques points Fate aux joueurs.
LES ASPECTS DE SITUATION SONT VOS AMIS
Quand vous vous demandez s’il y a une bonne raison de demander aux joueurs de faire un jet pour surmonter quelque chose, pensez aux aspects de la scène. Si un aspect suggère aisément quelques difficultés pour le PJ, demandez à ce qu’il lance les dés pour surmonter ces difficultés. Si ce n’est pas le cas ou que vous ne trouvez pas de conséquences intéressantes en cas d’échec, n’insistez pas.
Par exemple, si un personnage essaie de traverser une pièce à toute vitesse et qu’il y a un aspect de situation comme Sol encombré, c’est cohérent de demander un jet pour savoir si la traversée est un succès. S’il ce type d’aspect n’existe pas, laissez le personnage traverser la pièce et passez à quelque chose de plus intéressant.
Rendre l’échec impressionnant
Si les PJ ratent un jet de dé au cours de la partie et que vous ne savez pas trop comment rendre cela intéressant, essayez une des astuces suivantes.
La faute aux circonstances
Les PJ sont des gens extrêmement compétents (rappelez-vous, c’est un des fondamentaux de Fate). Ils ne sont pas supposés avoir l’air d’idiots, ou très rarement. Parfois, tout ce qu’il faut c’est une bonne description pour transformer un échec en quelque chose de dynamique. À la place de simplement raconter comment les joueurs ont raté, montrez que l’échec est dû à quelque chose que les PJ ne pouvaient pas éviter. Cette serrure comporte un deuxième mécanisme beaucoup plus compliqué qu’il n’y paraissait (Cambriolage), ou le contact n’a pas tenu sa promesse d’être là à l’heure (Relations), ou ce livre ancien est vraiment trop abîmé pour pouvoir être déchiffré (Érudition), ou un léger tremblement de terre inattendu gâche complètement ton sprint (Athlétisme).
De cette manière, les PJ restent compétents et imposants bien qu’ils n’obtiennent pas ce qu’ils veulent. En plus, dire que c’est la faute aux circonstances vous donne l’opportunité de proposer un nouveau plan d’action, transformant l’échec en élan pour aller de l’avant dans l’histoire. Le contact n’est pas venu à son rendez-vous ? Où est-il ? Qui l’a suivi jusqu’au rendez-vous ? Le livre ancien est abîmé ? Peut-être qu’il peut être restauré. Ainsi, vous ne perdez pas de temps à vous étendre sur l’échec et vous pouvez passer à la suite.
Réussir à un prix
Vous pouvez aussi donner aux PJ ce qu’ils veulent, mais à un certain prix. Dans ce cas, rater un jet signifie qu’ils n’ont pas réussi à atteindre leur but sans conséquence.
Un prix moindre devrait compliquer la vie des PJ. Comme précédemment, l’idée est d’utiliser un échec pour modifier un peu la situation plutôt que de dire non à ce que les PJ voulaient. Voici quelques idées :
- Laissez préfigurer un danger à venir. «La serrure s’ouvre avec un clic inaudible, mais on ne peut pas en dire autant de la porte du coffre. S’ils ne savaient pas que vous étiez ici avant, maintenant cela ne fait plus aucun doute…»
- Amenez un nouveau détail à l’histoire. «Oui, le maître de la guilde peut te mettre en contact avec un mage capable de traduire le livre abîmé, un type qui s’appelle Berthold. Tu le connais en fait, mais la dernière fois que tu l’as vu, il y a un an environ, c’est quand il t’a supris dans les bras de sa femme.»
- Offrez un choix délicat au joueur. «Tu arrives à maintenir le plafond en train de s’écrouler suffisamment longtemps pour que deux personnes puissent quitter la pièce, mais pas les autres. Alors, qui s’en sort ?»
- Ajoutez un aspect à un PJ ou à la scène. «Tu arrives tant bien que mal à atterrir sur tes pieds mais avec une Entorse à la cheville comme souvenir.»
- Donnez un coup de pouce à un PNJ. «Nikolaï te surprend en acceptant ton offre, mais il le fait avec un sourire qui ne te met pas très à l’aise. C’est clair, Nikolaï a un plan.»
- Cochez une des cases de la jauge de stress du joueur. Attention avec cette manière de faire, ce n’est que si le PJ a de bonnes chances d’être blessé à nouveau au cours de la scène que cela devient un vrai prix à payer. Si vous n’êtes pas sûr que cela va arriver, choisissez autre chose.
Un prix fort fait plus que compliquer la vie d’un PJ ou que promettre que quelque chose de plus grave va se produire. Il entraîne des dégâts importants, voire même permanents.
Une manière de faire est de transformer un prix moindre en quelque chose de pire. Au lieu de soupçonner qu’un garde les a entendus ouvrir la porte du coffre, plusieurs gardes débarquent dans la salle, armes à la main. Au lieu d’être séparé de ses alliés par un plafond qui s’est écroulé, un ou plusieurs d’entre eux sont pris dans les gravats. À la place d’avoir à passer un moment gênant avec Berthold, ce dernier est toujours furieux et veut voir le sang couler.
Vous avez aussi d’autres options :
- Renforcez l’opposition. Vous pouvez effacer une des cases de la jauge de stress d’un PNJ, améliorer l’une de ses compétences d’un niveau, ou lui donner un nouvel aspect avec une invocation gratuite.
- Mettez en place une nouvelle opposition ou un nouvel obstacle, comme par exemple des ennemis supplémentaires ou un aspect de situation qui aggrave le cas des PJ.
- Retardez le succès. La tâche en cours prendra plus de temps que prévu.
- Donnez au PJ une conséquence découlant logiquement des circonstances, une conséquence légère si elle est toujours disponible, modérée sinon.
Si vous ne savez pas trop évaluer quelle est l’importance du prix à payer, vous pouvez vous appuyer sur le niveau d’échec. Ainsi, dans l’exemple de la porte du coffre, celui où les gardes entendent les PJ et débarquent dans la pièce, si le joueur rate son jet de Cambriolage de 1 ou 2, les PJ restent plus nombreux que les gardes. Le combat ne sera pas trop rude, mais cela restera un combat néanmoins. Si le jet est raté de 3, 4 ou 5, c’est une lutte équilibrée qui va sans doute demander à ce qu’on dépense des points Fate ou qu’on accepte des conséquences. Mais, si le jet est raté de 6 ou plus, les PJ font face à des forces supérieures en nombre et courent un réel danger.
Laissez les joueurs faire le boulot
Vous pouvez aussi demander à vos joueurs de déterminer les causes de leur échec. C’est un bon moyen pour encourager un esprit de collaboration et vous serez surpris de constater que certains joueurs sont enthousiastes à l’idée de mettre des bâtons dans les roues de leur personnage pour faire avancer l’histoire, surtout si ça leur permet d’avoir plus de contrôle sur la façon dont on perçoit leur personnage.
C’est aussi un bon moyen de vous en sortir quand vous n’avez pas d’idée. «Bon, alors tu as raté ce jet de Cambriolage de 2. Donc, tu étais en train de crocheter cette serrure et quelque chose ne se passe pas bien. Tu as une idée de ce que c’est ?» «Vous avez raté ce jet de Perception. Qu’est-ce que vous n’avez pas remarqué pendant que vous vous glissez jusqu’à la chambre de la Reine ?» C’est mieux si la question que vous posez est précise, comme dans les exemples, car si vous dites seulement «bon, dis-moi pourquoi tu échoues ? «, cela peut aisément ralentir le jeu et mettre un joueur sur la sellette sans que cela soit vraiment utile. C’est bien si vous laissez les joueurs faire le travail, mais vous ne devez pas les forcer à le faire.
Choisir une difficulté
Quand vous décidez d’une opposition passive lors d’une action, gardez en tête les échelons de difficulté que nous avons mentionnés dans le chapitre Actions et résultats. Tout ce qui est au moins deux crans au-dessus du niveau de compétence des PJ leur coûtera probablement des points Fate, et tout ce qui est au moins deux niveaux plus bas que leurs compétences sera réussi sans peine.
Plutôt que « simuler le monde » ou essayer d’être « réaliste », essayez de choisir les difficultés en fonction de l’intensité dramatique nécessaire. En général la difficulté devrait être plus élevée quand les enjeux sont grands et plus faibles quand il n’y en a pas vraiment.
(D’un point de vue logique, choisir la difficulté en fonction des enjeux donne le même résultat que choisir une difficulté cohérente avec le monde et la modifier ensuite avec des pénalités ou des bonus pour tenir compte des circonstances, comme se dépêcher ou prendre son temps. Mais, psychologiquement, il y a une grande différence entre une difficulté élevée et une difficulté plus faible mais avec des pénalités ; cette différence ne doit pas être sous-estimée. Un joueur qui se retrouve face à quelque chose de difficile se sentira confronté à un vrai défi alors qu’un joueur qui se retrouve face à des pénalités élevées, soumises à l’arbitraire du MJ, peut se trouver découragé.)
Choisir une difficulté assez basse a pour but principal de permettre à un joueur de montrer à quel point son personnage est impressionnant, il pourra ainsi briller et montrer à tous ce qui fait l’intérêt ou l’attrait de ce personnage. Vous pouvez aussi choisir des difficultés peu élevées quand vous savez que vos PJ n’ont pas beaucoup de points Fate, ce qui leur laisse la possibilité d’accepter des contraintes pour en avoir plus. Vous devriez aussi choisir des difficultés assez faibles lorsqu’il s’agit d’obstacles qui empêchent les PJ de se retrouver dans l’action principale de la scène, il n’y a aucun intérêt de les bloquer devant le pont-levis du château du seigneur maléfique si votre but principal est justement la confrontation avec celui-ci !
Enfin, la difficulté de certaines actions devrait être peu élevée par défaut, surtout si personne ne s’y oppose ou n’y résiste. La difficulté pour créer un avantage sans opposition lors d’un conflit ne devrait jamais être supérieure à Moyen (+1) ou Passable (+2), et il en va de même lorsque vous tentez d’ajouter un aspect sur un objet ou un lieu. Souvenez-vous qu’une opposition ce n’est pas seulement un PNJ qui s’interpose en personne. Si le grand cerveau machiavélique a caché les preuves de son complot dans son bureau pour empêcher qu’on les trouve, c’est une forme possible d’opposition même si cette personne n’est pas physiquement présente.
Si les PJ ont trop de points Fate, ou si c’est un moment crucial de l’histoire et qu’une vie est en jeu, ou que le destin d’un grand nombre de gens est sur la balance, ou que les PJ sont enfin en train d’affronter les ennemis qu’ils pourchassaient depuis un ou deux scénarios, n’hésitez pas à augmenter la difficulté des actions. Vous devriez aussi augmenter la difficulté des jets quand un ennemi s’est tout spécialement préparé pour affronter les PJ, ou pour bien montrer que le contexte n’est pas très favorable, par exemple quand les PJ ne sont pas préparés, ou qu’ils n’ont pas les bons outils nécessaires, ou qu’ils sont pressés par le temps, etc.
Choisir une difficulté du même niveau que les compétences des PJ est, comme vous pouvez l’imaginer, un intermédiaire entre les deux extrêmes précédents. Faites-le quand vous voulez un peu de tension mais sans aller dans l’excès, ou quand les chances sont plutôt du côté des PJ mais que vous voulez quand même qu’ils courent un risque.
TRÈS IMPORTANT : JUSTIFIEZ VOS CHOIX
Votre seule autre contrainte quand vous choisissez les difficultés est liée à la règle d’argent donnée précédemment : vous devez vous assurer que vos choix sont plausibles et cohérents dans le contexte de l’histoire que vous créez. Bien qu’on ne vous conseille pas de vous prendre la tête en essayant de modéliser le monde à outrance et ainsi de vous retrouver coincé par trop de contraintes («Les serrures du village de Glenwood sont généralement de Bonne qualité grâce à la mine de fer toute proche»), faites attention à ne pas réduire le jeu à des nombres. Si la seule raison que vous avez pour choisir une difficulté de Formidable (+5) c’est d’avoir deux rangs de plus que le niveau de compétence des personnages et de vouloir leur faire perdre leurs points Fate, la crédibilité de votre partie va s’en ressentir.
D’un certain côté, choisir une difficulté c’est un peu comme invoquer un aspect, vous devez avoir une bonne raison qui justifie votre choix dans l’histoire. Que vous soyez en train d’inventer cette justification ou qu’elle ait été prévue à l’avance n’a pas d’importance. Les aspects de situation sont de bons outils pour ça. Si les joueurs savent déjà que dans la caverne où ils se trouvent, il fait Nuit noire et que c’est Vachement étroit, vous n’aurez aucun problème pour justifier qu’il est difficile de se glisser sans bruit alors qu’ils progressent avec Discrétion dans les boyaux. Personne ne sourcillera quand vous annoncerez que chacun de ces aspects ajoute une opposition de +2 au jet de Discrétion, car cela reflète le bonus à l’invocation qu’un joueur pourrait avoir.
Quoi qu’il en soit, ne sautez pas cette étape de justification, soit vous la donnez aux joueurs quand vous annoncez la difficulté, soit vous haussez les épaules d’un air mystérieux et vous leur montrez un peu plus tard le pourquoi de cette difficulté (genre, le temps qu’il vous faudra pour trouver une explication valable).
Vous pouvez aussi utiliser des niveaux de difficulté « improbables » pour indiquer qu’il y a là une énigme sans réponse au cours de la partie, pour l’instant. Pour une raison bizarre, l’étable dans laquelle vous essayez de pénétrer a une serrure Épique (+7) sur sa porte. Qu’est-ce qu’il peut bien y avoir dans cette étable pour justifier une telle précaution ? Mystère…
Ou, enfin, vous essayez de passer l’examen final pour devenir un initié de l’Ordre Scolastique de l’Améthyste et la difficulté de votre jet d’Érudition n’est « que » de Passable (+2), c’est quoi l’embrouille ? Est-ce qu’ils vous facilitent la tâche ? Est-ce qu’il y a des raisons politiques pour que vous deveniez un initié ? Qui tire les ficelles ? Ou alors, est-ce que c’est la réputation de l’Ordre qui est surfaite ?
Que faire avec les succès extraordinaires ?
Parfois, un PJ va réussir un jet avec un résultat bien plus important que ce qui était nécessaire, obtenant du coup de nombreux crans de réussite sur son jet. Quelques-unes des actions de base prévoient les effets pour ce genre de jet particulièrement réussi, comme par exemple frapper plus fort quand vous attaquez.
Pour d’autres actions, les conséquences ne sont pas si claires. Qu’est-ce qui se passe quand vous obtenez de nombreux crans de réussite sur un jet de Métiers ou d’Enquête ? Faites en sorte que ces résultats extraordinaires aient des effets qui ont du sens et qui mettent en avant les capacités des PJ.
Voici quelques possibilités qui s’offrent à vous.
- Lâchez-vous sur la narration : cela peut sembler superflu, mais c’est en fait important d’encenser ce jet extraordinaire avec une narration adaptée. Saisissez l’opportunité d’utiliser les suggestions présentées précédemment pour Rendre l’échec impressionnant et appliquez-les. Faites en sorte que le succès ait des conséquences au-delà de ce que désirait le joueur et impliquez les joueurs dans le processus créatif en leur demandant de remplir les détails qui manquent. «Trois crans de réussite sur ton jet de Cambriolage, ma foi, plus personne ne pourra jamais refermer cette crypte à clef…» «Donc tu as cinq crans de réussite sur ce jet de Relations, à toi de m’expliquer où on peut trouver Nick le Mouchard quand il veut se cacher de sa femme, et surtout qu’est-ce que tu lui dis une fois que tu l’as trouvé…»
- Ajouter un aspect : vous pouvez aussi vous servir de ces jets extraordinaires pour placer des aspects sur les PJ ou sur la scène, ce qui revient à créer des avantages gratuitement. «Tu as réussi ton jet de Ressources pour corrompre les gardes avec quatre crans de réussite ? Pas de soucis, ils te laissent passer les portes sans problème, et ils pourront servir de Renfort potentiel si tu as besoin d’aide plus tard.»
- Réduire le temps : si c’est important de réussir rapidement, alors n’hésitez pas à utiliser ces crans de réussite supplémentaires pour réduire le temps que prend une action.
Gérer le temps
Il y a deux sortes de temps dans Fate : le temps de jeu et le temps narratif.
Le temps de jeu
Le temps de jeu concerne l’organisation du jeu pour les vraies personnes, les joueurs qui sont autour de la table. Chaque unité de temps de jeu correspond à une certaine durée dans la vraie vie. Ces différentes unités de temps sont :
- Un échange : le temps qu’il faut pour que tous les participants d’un conflit jouent chacun un tour, cela inclus de pouvoir faire une action et de réagir aux actions faites contre leur personnage. En général, cela ne prend pas plus de quelques minutes.
- Une scène : le temps qu’il faut pour résoudre un conflit, gérer une situation importante ou atteindre un but. Les scènes sont d’une durée variable, entre une ou deux minutes si c’est juste une description rapide et quelques dialogues, jusqu’à plus d’une demi-heure dans le cas d’un combat majeur contre un PNJ principal.
- Une session : c’est l’ensemble des scènes que vous allez jouer lors d’une séance de jeu. Une session se termine quand vous et vos amis rangez vos affaires et rentrez chez vous. La plupart du temps, une session dure entre 2 et 4 heures, mais il n’y a pas de limite théorique. Si vous n’avez pas de contraintes, vous n’êtes limités que par le besoin de manger et de dormir… Généralement, à la fin d’une session, vous atteignez une étape mineure.
- Un scénario : une ou plusieurs sessions de jeu, mais rarement plus de quatre. La plupart du temps, les sessions qui composent un scénario permettent de résoudre un problème ou un dilemme présenté par le MJ, ou encore de terminer une intrigue (voir Scènes, session et scénarios pour en savoir plus sur les scénarios). Une étape importante conclut généralement un scénario. Vous pouvez voir ça comme un épisode d’une série télé, le nombre de sessions qu’il faut pour raconter une histoire.
- Un arc narratif : plusieurs scénarios, souvent entre deux et quatre. Un arc narratif culmine typiquement sur un évènement qui produit un changement majeur dans le cadre de la partie, conséquence directe de la résolution des scénarios. Dans le cadre d’une série télévisée, un arc narratif est une saison où les scénarios mènent à un dénouement tumultueux. Vous n’aurez pas tout le temps un arc narratif facilement identifiable, c’est aussi le cas dans les séries télé qui n’ont pas toutes une intrigue principale qui court tout au long de la saison. Il se peut que l’on aille de situation en situation sans que l’histoire ne soit vraiment structurée. On arrive souvent à une étape majeure à la fin d’un arc narratif.
- Une campagne : la somme de tous le temps que vous avez passé autour de la table pour cette aventure en utilisant Fate : toutes les sessions, les scénarios, les arcs narratifs. Techniquement, il n’y a pas de limite à la durée d’une campagne. Il y a des groupes qui jouent des campagnes sur plusieurs années, d’autres s’arrêtent après le premier arc narratif. Un groupe typique fera des campagnes avec quelques arcs narratifs (environ 10 scénarios). Une campagne est une sorte de « super arc narratif », avec un conflit global qui englobe tout le reste, ou cela peut aussi être une suite d’histoires sans liens entre elles mais dans le même cadre.
Le temps narratif
Le temps narratif est le temps comme il est perçu par les personnages, du point de vue de « l’intérieur » de l’histoire. C’est le temps qui s’écoule dans l’histoire quand les personnages sont en train de faire les choses que vous et les joueurs décidez qu’ils font. C’est souvent après coup que vous déciderez de comment ce temps s’écoule, en le mentionnant au passage («Bien, il vous faut donc une heure pour vous rendre à l’aéroport en taxi») ou au cours d’un jet de dé («Super, alors après avoir fouillé la pièce pendant 20 minutes, vous trouvez les choses suivantes…»)
Dans la plupart des circonstances, le temps narratif n’a rien à voir avec le temps réel. Par exemple, un échange au cours d’un combat peut prendre quelques minutes de temps réel à jouer, mais cela ne décrit que se qui se passe dans les premières secondes du conflit. De même, vous pouvez couvrir de longues périodes de temps en un instant, juste en l’annonçant («Il se passe deux semaines avant que votre contact réapparaisse — est-ce que vous faites quelque chose en attendant ou est-ce que nous pouvons directement aller à la scène de la rencontre ?»). Quand vous le faites défiler comme ça, c’est parce que c’est plus pratique, une astuce narrative pour ajouter plus de vraisemblance et de la cohérence à l’histoire.
Parfois, cependant, vous pouvez utiliser le temps narratif de manière créative pour amener de la tension et de la surprise au jeu. Voici quelques façons de faire.
La pression de l’échéance
Rien de tel pour créer de la tension qu’une bonne vieille échéance. Les héros n’ont que peu de temps, un nombre de minutes fixé à l’avance, pour désamorcer un piège mortel, ou un certain temps pour traverser la ville et verser la rançon avant que ceux qu’ils aiment soient trucidés par les méchants, etc.
Certaines actions par défaut du jeu permettent de tirer parti de la pression due à une échéance, par exemple les défis ou les compétitions. Ces actions limitent le nombre de jets qu’un joueur peut faire avant que quelque chose ne se passe, pour le meilleur ou pour le pire.
Les deux actions citées plus haut ne sont pas les seules dont vous pouvez tirer parti. Si, dans votre scénario, vous avez fixé une vraie échéance pour que quelque chose de mal se passe, vous pouvez commencer à garder la trace du temps qui passe et utiliser cette information pour mettre un peu de pression sur les joueurs. («Ah, vous voulez passer en revue toutes les archives de la ville ? Bon, vous avez trois jours avant le rituel — vous avez droit à un jet d’Érudition, mais cet essai va vous demander au moins un jour de votre temps.») Souvenez-vous, presque toutes les actions prennent du temps. Même une simple tentative de créer un avantage en utilisant Empathie nécessite de discuter un peu avec votre cible, et si chaque action grignote un peu le temps qu’il reste aux PJ avant l’échéance fatale, il se peut qu’ils n’aient plus le temps d’agir.
Bien sûr, ça ne serait pas drôle s’ils n’avaient aucun moyen d’améliorer leur situation avant l’échéance ou si cette échéance était inévitable.
Utiliser le temps narratif pour les succès ou les échecs
Quand vous vous servez du temps narratif pour créer de la tension à cause d’une échéance, n’hésitez pas à incorporer des sauts temporels difficiles à prévoir lorsque les PJ obtiennent de bons ou de mauvais résultats sur leurs jets de dés.
Rendre l’action plus longue que prévu est un bon moyen de rendre les échecs formidables (au sens où nous en avons parlé précédemment), surtout en utilisant l’option « Succès à un prix ». Donnez aux joueurs ce qu’ils veulent, mais en contrepartie leur action prend plus de temps, ce qui augmente le risque que leurs efforts soient trop tardifs. Ou ce temps supplémentaire fait expirer l’échéance, peut-être que tout n’est pas perdu, mais il faut maintenant faire avec de nouveaux problèmes.
De même, récompensez les succès extraordinaires en réduisant le temps que prend une action quand les PJ sont pressés par le temps. Cette recherche historique (Érudition) qui allait prendre un jour est finalement achevée en quelques heures. Alors que vous cherchez un marchand approprié pour votre ravitaillement (Relations), vous réussissez à en trouver un autre qui peut vous livrer le jour même, au lieu de la semaine habituelle.
Si le temps est une des variables de l’histoire, vous pouvez aussi utiliser des invocations ou des contraintes pour le manipuler, pour rendre les choses plus faciles ou plus compliquées. («Hé, je suis un gars qui Vit dans son garage, alors ça ne devrait pas me prendre trop de temps de réparer cette voiture, non ?» «Ah, tu sais quoi ? Ta feuille de personnage dit que Quand je joue je n’en ai jamais assez… il me semble que ce serait plausible que lorsque vous allez chercher ce type dans le casino, tu risques de te laisser distraire, avec toutes ces machines à sous et ces tapis verts et …»)
Ça vaut combien de temps un cran dans un succès ?
Comme pour les autres types de lancers de dés, le nombre de crans de réussite (ou d’échec) devrait vous donnez une idée du temps perdu ou gagné. Mais comment allez-vous décider de combien de temps vous allez récompenser ou pénaliser les personnages ?
En fait, cela dépend vraiment de la durée initiale de l’action. Généralement, nous exprimons les durées en deux parties : une mesure de quantité abstraite ou précise, puis une unité de temps, par exemple « quelques jours », « vingt secondes », « trois semaines », etc.
Nous vous recommandons de mesurer le temps de façon assez abstraite et de n’utiliser qu’« une demi », « une », « quelques » ou « plusieurs » pour mesurer les unités de temps. Ainsi, si vous pensez que cette action devrait prendre six heures, pensez-y comme « plusieurs heures ». Si vous pensez que cela va prendre vingt minutes, cela peut devenir « plusieurs minutes » ou être arrondi à « une demi-heure », selon ce qui vous semble le mieux. Vous avez alors un point de départ pour modifier la durée. Chaque cran décale cette durée de temps d’un niveau. Par exemple, si votre point de départ était « plusieurs heures » et que le décalage se fait au bénéfice des PJ qui veulent raccourcir cette durée, ça marche comme ça : un cran réduit la durée à « quelques heures », deux crans à « une heure » et trois crans à « une demi-heure ».
Si vous dépassez l’échelle de valeurs, vous passez à l’unité de temps supérieure ou inférieure. Par exemple, quatre crans dans l’exemple précédent vous mèneraient de « plusieurs heures » à « plusieurs minutes ». Si vous avez raté d’un cran par contre, cela vous ferait passer de « plusieurs heures » à « une demi-journée ».
Cela vous permet de gérer rapidement le temps quel que soit votre point de départ, que les actions en cours prennent quelques instants ou plusieurs générations.
Le temps narratif et l’étendue d’une action
Quand on pense aux actions que peuvent faire les PJ, on imagine d’abord qu’elles sont limitées à ce que les personnages peuvent affecter directement sur une échelle individuelle, de « personne à personne ». Et la plupart du temps, c’est exactement ce dont vous avez besoin et ce qui va se passer. Après tout, Fate est un jeu où les compétences individuelles permettent de briller face à l’adversité. Cependant, prenez le temps de réfléchir à ce que pourrait faire le PJ avec cette compétence et tout le temps nécessaire. Imaginez qu’un jet de Sociabilité lors d’une négociation dure un mois et où le PJ prend le temps de parler longuement et en détail avec chaque délégué, plutôt que de se concentrer sur une unique conférence. Imaginez une Enquête qui dure des semaines, où chaque détail de la vie du suspect est passé au crible.
En permettant à une action, et donc à un jet, de couvrir une large période de temps, vous pouvez « prendre du recul » pour gérer des évènements dont les ramifications ne sont plus à l’échelle du personnage mais qui peuvent grandement affecter le cadre. Ce jet de Sociabilité d’une durée d’un mois peut donner naissance à une nouvelle direction politique pour le pays du PJ qui négociait. Ce jet d’Enquête peut aboutir à faire intervenir plus directement dans l’histoire l’un des criminels les plus célèbres, celui qui harcelait les PJ depuis le début de la campagne.
C’est une excellente façon de gérer les longues pauses dans l’histoire et de les rendre plus interactives plutôt que de ralentir le jeu avec une longue narration ou en essayant de trouver, rétroactivement, ce qui s’est passé durant tout ce temps. Si les PJ ont des buts à long terme, essayez de voir si vous pouvez transformer cela en une compétition, un défi ou un conflit qui dure toute la pause. Faites leur faire un jet pour voir si un imprévu arrive. En cas d’échec, les conséquences que vous allez inventer créeront du jeu pour la suite de l’histoire.
Souvenez-vous que si vous changez l’échelle temporelle d’un conflit ou d’une opposition, vous devez aussi changer l’échelle temporelle des échanges. Si un conflit se déroule sur un an, chaque échange peut représenter un mois ou deux, et tout le monde devrait décrire ses actions et le résultat de ces actions, en tenant compte de cette durée.
Lors d’une étape majeure de la campagne en cours, Landon modifie son concept en Ancien disciple du Linceul d’Ivoire suite à la découverte d’un complot interne qui visait à prendre le contrôle d’un petit royaume.
Amandine veut faire faire à la campagne un bond de 6 mois en avant et elle suggère que si Landon est en fuite, ils vont le pourchasser. Elle voit là une occasion de créer du jeu pour la suite de la partie, elle annonce donc «Je pense que nous devons savoir si Landon commence le prochain scénario dans leurs griffes ou pas.»
Ils décident de résoudre ça comme un conflit, où chaque échange représente une confrontation entre Landon et les poursuivants du Voile. Ça se passe mal pour lui et il concède, recevant de plus une conséquence modérée pour la prochaine session. Amandine suggère qu’ils essaient de faire rentrer Landon dans le rang plutôt que de le blesser ou de le tuer, et Oli décide de prendre Je ne sais plus ce qui est juste comme conséquence pour refléter le doute qu’ils ont su implanter en lui.
Quand nous reverrons Landon, il sera donc de nouveau dans les griffes du Voile d’Ivoire, en train de se débattre avec ses différentes loyautés.
Zoom avant, zoom arrière
Il n’y a rien dans les règles qui impose que vos jets doivent rester cohérents en termes de temps narratif. Une bonne astuce consiste à utiliser le résultat d’un jet pour enchaîner ensuite sur un autre jet à une échelle temporelle différente, et vice-versa. C’est une excellente manière de lancer une nouvelle scène, un nouveau conflit ou une nouvelle compétition, ou simplement pour introduire un changement de rythme.
Au cours de la pause de six mois mentionnée précédemment, Cynere fait des recherches sur les acolytes démoniaques du terrifiant Arc’yeth, qui a brûlé son âme lors du dernier arc narratif de la campagne. Elle décide de faire ces recherches toute seule, bien que Zird lui ait offert son aide, et elle fait donc un jet d’opposition avec sa compétence d’Érudition qu’elle vient d’améliorer au niveau Moyen (+1).
Elle s’en sort vraiment bien et Amandine décrit Cynere qui se plonge dans ses recherches pendant quelques mois. Puis Amandine ajoute «Impressionnant. Tu retournes à la maison, couverte de la poussière du voyage, exténuée, les doigts tachés d’encre, mais tes recherches t’ont permis de localiser la cachette du bras droit d’Arc’yeth au sein du Cercle des Treize, un démon mineur du nom de Tan’shael (toutes ces apostrophes !). Tu tombes dans ton lit, prête à te lancer à la chasse le lendemain matin… pour être réveillée en plein milieu de la nuit par un fracas terrible qui vient de ton bureau.»
Lucie dit «Ah, par tous les diables, je me lève et je me rue là-bas en choppant mon épée au passage !» Amandine répond «Super. Tu remarques que tes notes sur tes recherches ont disparu et que la fenêtre a été brisée. Tu entends aussi des bruits de pas qui s’enfuient dans la nuit.» Lucie annonce «Oh, pas question. Je le pourchasse. Enfin, lui ou elle, ou quoi que se soit.»
Amandine reprend «Parfait ! Tu utilises Athlétisme, et nous allons entamer une compétition pour voir si tu rattrapes le coupable.» (MJ, remarquez que nous venons de passer, d’un coup, de jets qui avaient une durée de plusieurs mois à des jets qui couvrent les prochaines secondes de la poursuite.)
La compétition se passe mal pour Cyrene et le coupable s’enfuit. Lucie annonce immédiatement, «J’m’en fiche. Y’a forcément quelqu’un en ville qui sait quelque chose, ou il a pu laisser des indices derrière lui. Je vais faire un jet d’Enquête.»
Lucie lance les dés et réussit avec style, et Amandine dit alors «Une semaine plus tard, tu es dans le village de Sunloft, à l’extérieur de la taverne du Cheval sans Fer, où elle (oui, c’est bien une femme) est censée se trouver. En plus, tu as plusieurs crans de réussite, je vais donc te donner son nom : Corathia . Elle l’a donné à quelqu’un de ta ville natale lorsqu’elle essayait de trouver à se loger. Ça vaut bien un aspect, Je connais ton nom, que tu pourras utiliser pour ébranler sa confiance.»
(MJ, vous avez vu ce qui s’est passé. En un jet de dé, une semaine s’est passée, alors que Lucie et Amandine jouent de manière continue autour de la table.)
Lucie déclare «Je défonce la porte et je hurle son nom.»
Amandine dit alors «Tout le monde s’éloigne d’une femme souple et agile, qui se moque d’eux et se saisit de son épée, saute de son tabouret et fait siffler la lame de son épée d’un mouvement rapide pour te trancher le visage.»
«C’est parti !» s’exclame Lucie en s’emparant de ses dés. (C’est maintenant un conflit dont le déroulement narratif sera très détaillé).
Juger de l’utilisation des compétences et des prouesses
À présent, vous savez quasiment tout ce qu’il faut savoir pour gérer les compétences et les prouesses. Leurs descriptions sont dans Compétences et prouesses, les actions sont décrites avec des exemples, dans Défis, compétitions et conflits et les conseils de ce chapitre vous éclairent sur le choix des difficultés et comment gérer les succès et les échecs.
Le seul autre problème majeur que vous pouvez rencontrer concerne les « cas limites » au niveau des compétences. Par exemple quand un joueur veut utiliser une compétence pour une action et qu’il faut tordre un peu les règles, ou vous vous retrouvez dans une situation où l’utilisation d’une compétence semble logique mais en dehors du cadre de son utilisation prévue.
Quand vous rencontrez ce genre de cas, parlez-en avec le groupe pour voir ce qu’en pensent les autres. Il y a généralement trois cas possibles :
- C’est un cas trop limite. Envisagez de créer une nouvelle compétence.
- En fait, c’est une utilisation tout à fait légitime de la compétence et, à partir de maintenant, tout le monde peut l’utiliser aussi de cette manière.
- Cela ne poserait pas de problème si le personnage avait une prouesse qui couvrait cette situation.
Les critères sur lesquels vous allez vous appuyer au cours de cette discussion viennent essentiellement de tout le travail préparatoire que vous et les joueurs avez effectué en établissant la liste des compétences lors de la création du cadre. Le chapitre Compétences et prouesses vous donne de nombreux conseils pour définir les limites d’une compétence et quelle est la ligne de démarcation entre une compétence et une prouesse.
Si vous décidez que l’utilisation d’une compétence nécessite une prouesse, permettez au joueur de dépenser un point Fate pour posséder cette prouesse de manière temporaire, le temps du jet. Plus tard, s’il veut continuer à profiter de ce « bonus », il lui faudra dépenser un point de Restauration pour l’acquérir (s’il en a un de disponible), ou attendre une étape majeure pour l’ajouter à son personnage.
Les aspects et les détails : découverte contre création
Du point de vue des joueurs, il n’y a aucun moyen de faire la différence entre ce que vous avez préparé à l’avance et ce que vous êtes en train d’inventer sur le moment, surtout si vous êtes le genre de MJ qui ne montre pas ses notes ou qui ne les consulte pas pendant la partie. Dès lors, si vos joueurs essayent de découvrir quelque chose que vous n’avez pas encore préparé, vous pouvez gérer ça comme s’ils étaient en train de créer un nouvel aspect ou un nouveau détail. S’ils réussissent, ils trouvent ce qu’ils cherchaient. S’ils ratent, vous pouvez vous servir de ce qu’ils essayaient de créer pour vous aider à déterminer ce qui est vrai.
Si vous êtes vraiment à l’aise pour improviser, cela veut dire que vous n’avez pas besoin de préparer grand-chose avant la partie, et vous pouvez vous laisser guider par les questions et les réactions des joueurs pour construire l’histoire et ce qui va avec. Vous pouvez poser quelques questions d’approfondissement d’abord, pour mieux cerner ce que recherchent les joueurs, mais à partir de là votre seule limite est votre imagination.
Zird l’Hermétique est parti explorer un ancien site de rituels, à la recherche d’un endroit idéal pour tenter de lever la malédiction qui a été lancée sur le village voisin de Belwitch, le maire du village l’ayant grassement payé pour ça.
Alex annonce «Je vais passer un peu de temps dans la bibliothèque locale, pour faire des recherches sur l’histoire du site. J’aimerais utiliser Érudition pour créer un avantage.»
Amandine réfléchit pendant un moment. Elle n’a pas prévu grand chose à propos de ce site car elle avait concentré son énergie pour détailler la malédiction et ce qu’il est nécessaire de faire pour s’en débarrasser, la malédiction étant entretenue par des forces bien plus puissantes que ce que n’imaginent les PJ.
«Quel genre d’information cherches-tu ?» demande Amandine. «Des données qui viendraient de rapports faits sur le site ou … ? »
Alex répond, «En fait ce que je voudrais vraiment savoir c’est si quelqu’un a utilisé le site pour de la magie noire ou maudite… si ce village a une sorte de croquemitaine local ou alors de sombres histoires autour de ce site.»
Amandine reprend, «Oh, d’accord. Fais un jet d’Érudition, contre une opposition Passable (+2).» Pas de chance, Alex obtient un -4 pour un résultat final de Médiocre (+0), il a donc raté. Alex décide de ne pas dépenser de point Fate sur ce jet.
Comme elle a envie de faire de cet échec quelque chose de néanmoins remarquable, Amandine annonce, «Bon, tu ne gagnes pas d’aspect, mais ce que tu apprends est en fait à l’opposé de ce que tu cherchais : il a une excellente réputation et c’est un endroit sacré, tous les registres parlent de rituels de guérison et de moissons qui enrichissaient la région.»
Alex demande, «Si le site est si puissant, comment se fait-il que le village soit maudit ?»
Amandine hausse les épaules, «J’ai bien l’impression que tu devras fouiller plus pour le savoir.»
Dans ses notes, elle ajoute quelques mots sur le fait que le site a été magiquement désacralisé et que le prêtre de la ville garde cette information secrète, modifiant légèrement la suggestion d’Alex et ajoutant ainsi quelques éléments de jeu s’il décide de poser des questions aux alentours.
Compétences et mesures précises
En regardant les descriptions des compétences, vous avez pu noter qu’à plusieurs endroits nous parlons en termes abstraits de ce qui, dans la vie réelle, pourrait être mesuré précisément. Physique et Ressources en sont de bons exemples. La plupart des gens qui font de la musculation ont une idée du poids qu’ils peuvent soulever, et les gens dépensent des sommes d’argent précises pour acheter des biens, en piochant dans une réserve finie.
Dès lors, quel est le poids qu’un personnage avec un Excellent (+4) Physique peut soulever ? Combien peut-on dépenser quand on a des Ressources au niveau Correct (+2) avant d’être ruiné ? Pour être franc, nous n’en avons aucune idée, et nous n’avons pas vraiment envie de vous donner une réponse précise.
Bien que cela puisse sembler contre-intuitif, nous pensons que s’attacher à ce niveau de précision vous distrait de la cohérence et de la vraisemblance du jeu. Dès que vous posez un détail comme « Un Physique Excellent peut soulever une voiture pendant cinq secondes », vous vous privez de nombreuses autres options qui sont pourtant possibles dans la vie réelle. L’adrénaline et d’autres paramètres permettent aux gens de dépasser leurs limites ou, au contraire, d’en être bien loin. Vous ne pouvez pas prendre en compte tous ces paramètres sans y consacrer une large partie du temps que vous passez autour de la table. Cela peut même devenir un objet de discussion et de dispute plutôt que d’apporter quelque chose à la scène.
C’est aussi lassant. Si vous décidez que des Ressources Correctes (+2) peuvent s’offrir tout ce qui vaut 200 pièces d’or ou moins, vous avez ôté de la partie une source potentielle de tension ou d’intensité dramatique. Maintenant, à chaque fois que vous avez un problème qui est lié à vos Ressources, cela va se ramener à savoir si le prix est supérieur ou inférieur à 200 pièces d’or, et potentiellement vous éloigner de l’objet même de la scène en cours. Cela transforme tout en une simple question de réussite/échec, ce qui veut dire que vous n’avez même plus besoin de lancer les dés. Et enfin, ce n’est pas réaliste : quand les gens dépensent de l’argent, le problème n’est pas vraiment le montant en euros mais plutôt de savoir si celui qui achète peut vraiment se le permettre.
Souvenez-vous qu’un jet de compétence est avant tout un outil narratif destiné à répondre à la question suivante : « Puis-je résoudre le problème X avec le moyen Y, là maintenant ? » Si vous obtenez un résultat inattendu, laissez-vous guider par votre sens du réalisme et de la dramatique pour l’expliquer et le justifier, en utilisant les indications ci-dessus. « Oh, tu as raté ce jet de Ressources pour soudoyer le garde ? Je parie que tu es resté un peu plus longtemps que prévu à la taverne hier soir… attends, comment ça se fait que ta bourse ait disparu ? Et qui est ce personnage un peu louche qui s’en va rapidement, juste derrière les gardes ? Tu as rêvé ou il vient de te faire les poches en un clin d’œil ? Quel bâtard… que fais-tu maintenant ? »
Gérer les conflits et autres trucs bizarres
En tant que MJ, les situations les plus compliquées que vous allez rencontrer seront les conflits, vous pouvez nous croire. Par rapport aux autres phases de jeu, ce sont eux qui utilisent le plus de règles du jeu et dans un intervalle de temps très réduit. Les conflits nécessitent de prendre des notes et de garder en mémoire plein de choses en même temps, les positions relatives de chacun, qui agit contre qui, le niveau de stress et de conséquence de tous vos PNJ, etc.
C’est aussi l’occasion de faire marcher le côté cinématographique de votre cerveau, surtout si votre partie met en jeu de nombreuses scènes d’action pleines d’adrénaline. Les séquences « action » que vous voyez dans les médias ne se conforment pas toujours à la structure bien organisée d’un tour de jeu de Fate. Dès lors ce n’est pas toujours facile de voir comment les deux peuvent correspondre, et donc de les « simuler » avec Fate. Parfois, les joueurs voudront faire des actions insensées que vous n’aurez pas prévues quand vous avez préparé le conflit, ce qui peut vous laisser désarmé quand il faudra les gérer.
Voici quelques outils pour vous aider à mieux appréhender ce genre de choses, avec grâce et rapidité.
Viser plusieurs cibles
Forcément, si vous jouez à Fate suffisamment longtemps, quelqu’un finira par vouloir viser plusieurs personnes en même temps lors d’un conflit. Les explosions en sont un exemple, mais ce n’est pas le seul, pensez au gaz lacrymogène ou à des étourdisseurs high-tech. Cela peut aussi s’étendre aux conflits mentaux. Vous pouvez utiliser Intimidation pour prendre l’ascendant dans une pièce, ou Sociabilité pour faire un discours bien pensé qui va toucher tous ceux qui l’entendent.
La façon la plus simple pour gérer ça est de créer un avantage pour la scène plutôt que pour une cible spécifique. Une Pièce pleine de gaz peut potentiellement affecter tout le monde, et ce n’est pas bien difficile d’imaginer que l’Ambiance enthousiasmante de la pièce puisse être contagieuse. Dans ce contexte, les aspects sont une bonne excuse pour demander un jet de compétence (en utilisant l’action de surmonter) pour toutes les personnes de la scène qui passent dans la pièce. En général, cela ne fera pas de dégâts, mais cela rendra les choses plus difficiles pour ceux qui sont touchés.
Landon parcourt le champ de bataille à la recherche d’un adversaire digne de lui.
« Qui à l’air le plus balaise, le plus costaud dans le coin ?», demande Oli à Amandine.
«C’est facile» répond Amandine. «Tu remarques immédiatement un guerrier qui mesure plus de 2 mètres., Il semble évident qu’il n’est pas entièrement humain et, de surcroît, il est armé d’une hache dentelée et flanqué de trois acolytes. Ils l’appellent Gorlok le demi-démon.»
«Ouais, ça va le faire,» annonce Oli. «Je vais le tuer.»
«Ça me va. Ses trois sbires arrivent pour t’intercepter. Ce ne sont pas des démons de 2 mètres, mais ils ont l’air de savoir ce qu’ils font.»
Oli soupire. «Je n’ai pas le temps pour ces nabots. Je veux leur faire comprendre rapidement qu’ils ne sont pas à la hauteur. Genre, je fais des moulinets menaçants avec mon épée en prenant une attitude de dur à cuir. Je veux qu’ils sachent que ce combat est être entre moi et Gorlok.»
«Pour moi, tu veux ajouter un aspect sur la zone. Fais-moi un jet d’Intimidation.»
Oli obtient un -3, ajoute sa compétence d’Intimidation qui est Passable (+2) pour un total Mauvais (-1). Il avait besoin d’un Médiocre (+0), il a donc raté. Mais Amandine aime bien l’idée d’un face à face entre Gorlok et Landon, sans personne d’autre pour interférer, elle décide donc de le lui accorder, mais à un prix.»
«Bon», dit-elle, «ça sera quoi le prix à payer ?»
Oli n’hésite pas. Il note une conséquence mentale légère : Ce gars est plus grand que je ne le pensais…
«Parfait. Ils te regardant, puis regardent Gorlok. Il fait un geste de la main dédaigneux. Allez vous trouver quelqu’un d’autre à tuer’, grogne-t-il, ‘celui-là est à moi’.»
Les choses sont un peu plus compliquées si vous voulez sélectionner les cibles touchées plutôt que d’affecter une zone entière. Quand cela arrive, divisez votre résultat entre toutes les cibles, qui peuvent alors se défendre normalement. Tous ceux qui ratent leur défense prennent du stress ou un aspect, en fonction de ce que vous essayez de faire. (Remarque : si vous créez un avantage pour mettre un aspect sur plusieurs cibles, vous obtenez une invocation gratuite pour chacune des cibles touchées.)
Zird l’Hermétique déchaîne de féroces forces magiques meurtrières sur ses ennemis, comme à son habitude. Il a trois adversaires en train de le charger en traversant le champ de bataille. Zird pense que c’est probablement de la faute de Landon s’il se retrouve dans cette situation.
La magie de Zird dépend de sa compétence Érudition, et son jet est particulièrement réussi puisqu’il obtient un résultat Épique (+7).
Il sait qu’il veut vraiment en blesser au moins un, il décide donc de diviser son jet en Superbe (+5), Moyen (+1) et Moyen (+1). Cela fait bien un total de +7, le résultat de son jet, donc tout va bien. C’est maintenant au tour d’Amandine de gérer la défense des trois sbires.
Le premier défenseur fait un jet Médiocre (+0) et prend 5 points de stress. C’est un PNJ anonyme (voir plus loin), et Amandine décide donc que le combat est fini pour lui en le décrivant alors qu’il est en train de crier et de se débattre dans les flammes.
Le second défenseur obtient un résultat Passable (+2), ce qui est mieux que le jet d’attaque. Sa charge furieuse n’est pas perturbée.
Le résultat du troisième défenseur est aussi Médiocre (+0), ce qui lui donne un seul point de stress. Amandine coche sa seule case sur son échelle de stress et raconte comment il sacrifie son bouclier pour dévier l’explosion de flammes.
Si quelqu’un veut attaquer toute une zone ou tous les personnages de la scène, vous allez devoir juger au cas par cas, comme tous les usages limites d’une compétence. En fonction du cadre de votre partie, ça peut être un cas tout à fait normal (par exemple si l’usage des grenades ou des explosifs est commun) ou impossible, et cela peut même nécessiter une prouesse. Tant que vous pouvez justifier ce que vous faites, vous n’avez pas besoin d’utiliser une règle spéciale, vous lancez les dés pour attaquer et tous ceux de la zone se défendent comme d’habitude. Parfois, il se peut même que vous ayez à vous défendre contre votre propre attaque si vous vous trouvez dans la zone d’effet.
Les contraintes et les Cibles multiples
Une petite note rapide : les joueurs qui veulent utiliser des contraintes pour se sortir d’un conflit ne peuvent pas l’utiliser contre plusieurs cibles en même temps, que cela soit justifié par la contrainte d’un seul ou de plusieurs aspects. Un joueur doit dépenser un point Fate pour chaque cible qu’il veut contraindre, c’est comme ça.
Autres dangers
Les éléments d’un conflit ne sont pas toujours des PJ ou des PNJ. Il y a plein de choses dénuées de conscience qui peuvent potentiellement blesser les PJ ou les empêcher d’atteindre leurs buts, que cela soit des catastrophes naturelles, des pièges ingénieux ou des systèmes de sécurité automatiques de haute technologie. Comment allez-vous donc gérer ce que les PJ affrontent qui n’est pas un personnage ? C’est simple : faites comme si cet adversaire était un personnage (c’est la règle de bronze de Fate : vous pouvez tout considérer comme un personnage. Nous allons passer en revue de nombreuses façons d’utiliser cette règle dans le chapitre sur Les extras, mais revenons d’abord à nos moutons.)
- Est-ce que cet élément peut blesser un PJ ? Donnez-lui une compétence et faites-le attaquer comme un adversaire normal.
- Est-ce que c’est plus une distraction ou un ennui qu’un réel danger ? Laissez-le créer des aspects.
- Est-ce que ça a des capteurs qu’il peut utiliser pour découvrir des aspects des PJ ? Donnez-lui une compétence pour ça.
De la même manière, les PJ peuvent utiliser leurs compétences contre ces menaces comme si c’était des adversaires. Un système de sécurité automatique peut être vulnérable à une attaque d’un PJ avec la compétence Larcins, ou les PJ peuvent entrer en compétition contre le piège en utilisant Athlétisme. S’il faut beaucoup d’efforts pour vaincre un danger, donnez-lui une échelle de stress et laissez-le prendre une conséquence moyenne ou deux. En d’autres termes, faites ce qui semble aider au mieux la narration. Si un feu est bien trop étendu pour qu’un PJ ne puisse l’éteindre, la scène devrait se concentrer sur les moyens de l’éviter ou de s’en échapper, ce que vous pouvez traiter comme un défi.
Cynere, Landon et Zird explorent les Cavernes de Kazak-Thorn, ils sont à la poursuite des démons auxquels Cynere s’est beaucoup intéressée récemment. Évidemment, la princesse démon concernée n’apprécie pas vraiment que de minables aventuriers la pourchassent, elle a donc invoqué des forces ténébreuses pour s’interposer entre elle et les aventuriers. Voici comment ça se passe.
Quand ils atteignent les profondeurs ultimes du réseau de cavernes, les PJ se retrouvent face à des volutes d’obscurité noires comme de l’encre, ondulant comme des serpents et semblant avaler la lumière partout où elles passent. Zird fait un jet d’Érudition et Amandine lui dit que ce sont des esprits magiques affamés, pas vraiment des entités individualisées mais plutôt une incarnation de la faim, prêts à dévorer tout ce qu’ils touchent. Il lance une pierre dans le sombre boyau et constate que les filaments d’obscurité la transforment en cendres.
«Je pense parler pour nous tous quand je dis ‘Beurk’», annonce Alex.
Il demande si c’est possible de bannir ces monstres. Amandine fait non de la tête et ajoute «Vous êtes au cœur du domaine d’Asahandra, et l’endroit est inondé de ce genre de choses. Cela prendrait des jours pour détruire un enchantement aussi puissant. Par contre, tu pourras utiliser ta magie pour les tenir à distance pendant que vous cherchez Asahandra.»
Lucie dit, «Ça me va. Allons-y.»
Alors qu’elle aurait pu directement gérer ça comme un conflit, Amandine décide que cela sera plus simple et plus facile de gérer cela comme un défi. Elle annonce aux joueurs que pour passer ces ombres conjurées, chacun d’entre eux devra utiliser sa Volonté pour résister à la puissante magie du lieu et Discrétion pour les traverser. Zird pourra utiliser Érudition pour essayer d’affaiblir cette nuée avec sa magie. De plus, elle annonce que chaque esprit offre une opposition active, et que si on rate un jet de Volonté cela sera géré comme une attaque. Nos trois héros serrent les dents et commencent à traverser la caverne…
Gérer les aspects
Comme pour les compétences et les prouesses, tout le chapitre Aspects et points Fate est fait pour vous aider à évaluer l’utilisation des aspects en jeu. En tant que MJ, une de vos grandes responsabilités est de gérer le flux de points Fate entre vous et les joueurs, en leur offrant des opportunités pour les dépenser afin de réussir et d’apparaître formidables, et en leur amenant des complications pour les aider à regagner des points.
Invocations
Dès lors, nous vous conseillons de ne pas être trop strict quand les PJ veulent invoquer un aspect, c’est important qu’ils dépensent leurs points Fate pour qu’il y ait un flux constant, et si vous êtes trop strict dans vos exigences, ils seront découragés.
D’un autre côté, n’hésitez pas à demander des éclaircissements si vous ne comprenez pas comment l’utilisation de l’aspect que suggère le joueur s’intègre à l’histoire. Parfois, ce qui semble évident à quelqu’un ne l’est pas pour un autre, et vous ne devez pas laisser l’envie de dépenser des points Fate prendre le dessus sur l’intérêt narratif. Si un joueur a des difficultés à justifier l’invocation d’un aspect, demandez-lui de donner un peu plus de détails ou d’expliquer ce qu’il a derrière la tête.
Vous pouvez aussi tomber sur des joueurs qui se sentent perdus devant l’immense possibilité offerte par les aspects. Ils ne les invoquent pas de peur de proposer des idées trop tordues par rapport à leurs aspects. Plus vous passez du temps au préalable pour faire en sorte que tout le monde soit sur la même longueur d’onde sur la signification des aspects, moins vous serez confronté à ce genre de situation. Pour inciter ou aider les joueurs à invoquer des aspects, demandez-leur toujours s’ils sont satisfaits par le résultat de leur jet («Bon, tu obtiens un Excellent (+2) jet. Ça te va ou tu veux être encore plus impressionnant ?») Indiquez clairement que l’invocation d’un aspect est une option qui est toujours disponible sur un jet, cela devrait aider à lancer la discussion. Une fois qu’un dialogue s’établit, tout va se mettre en place tranquillement.
Contraintes
Au cours d’une partie, soyez attentif aux opportunités pour contraindre les aspects des PJ, surtout dans les moments suivants :
- quand réussir, sans plus, est insipide
- quand un joueur n’a plus de point Fate
- quand quelqu’un essaye de faire quelque chose et que vous voyez immédiatement comment un aspect pourrait venir gâcher tout ça.
Souvenez-vous qu’il y a principalement deux grandes façons de contraindre au cours d’une partie : en s’appuyant sur une décision, quand quelque chose de compliqué arrive à la suite d’une action d’un personnage ; et en s’appuyant sur les évènements, quand les choses se compliquent simplement parce qu’un personnage se trouve au mauvais endroit au mauvais moment.
Des deux, ce sont les contraintes s’appuyant sur les évènements que vous utiliserez le plus. Votre boulot consistant principalement à décider comment le monde réagit aux personnages, vous avez toute la latitude nécessaire pour que des coïncidences improbables agrémentent leurs vies. La plupart du temps, les joueurs accepteront sans problème tout ce que vous leur proposerez, ou avec une négociation réduite au minimum.
Les contraintes s’appuyant sur les décisions sont un peu plus délicates à mettre en œuvre. Retenez-vous de suggérer des décisions aux joueurs et concentrez-vous plutôt pour trouver des réponses qui offrent des complications potentielles. Il est important que les joueurs se sentent entièrement responsables de leurs personnages, de ce qu’ils font et de ce qu’ils disent. Vous ne devez rien leur imposer en la matière. Si les joueurs jouent et incarnent leurs personnages en tenant compte de leurs aspects, cela ne devrait pas être difficile de relier les complications que vous proposez à l’un d’entre eux.
Au cours de la partie, vous devez aussi être très clair quand un aspect est effectivement contraint, et ce faisant, on ne peut pas revenir en arrière à moins de dépenser un point Fate. Quand les joueurs proposent leurs propres contraintes, la question ne se posera pas, car ils recherchent activement le point Fate. Quand c’est vous qui faites une suggestion, vous devez laisser aux joueurs l’occasion de négocier pour définir la complication avant d’arriver à la décision. Soyez clair sur tout ceci, et faites-leur bien savoir quand la phase de négociation est terminée.
Contraintes au rabais
Pour que toute la mécanique autour des contraintes fonctionne, il faut que vous soyez attentif à suggérer des complications avec un vrai impact dramatique. Évitez les conséquences superficielles qui n’affectent pas vraiment le personnage, sauf si vous voulez juste donner un peu de saveur à la scène. Si vous ne voyez pas comment la complication va vraiment modifier ou changer ce qui se passe dans l’histoire, vous avez sans doute besoin de faire monter la pression. Si le joueur ne s’exclame pas «Et merde…» ou toute autre réaction viscérale du même genre, faites monter la pression. Il ne suffit pas pour un personnage d’être simplement en colère envers quelqu’un, il faut qu’il soit tellement en colère qu’il ait envie de passer à l’acte maintenant, devant tout le monde. Ce n’est pas suffisant de vouloir boycotter son partenaire, il le boycotte et demande à tous ses associés de la mettre sur leur liste noire.
Gardez aussi à l’esprit que certains joueurs peuvent avoir tendance à proposer des contraintes un peu faibles quand ils ont besoin de points Fate, parce qu’ils n’ont pas vraiment envie de créer trop de problèmes à leur personnage. N’hésitez pas à demander quelque chose d’un peu plus rude pour leur personnage si la proposition initiale n’augmente pas vraiment le côté dramatique de la situation.
Inciter les joueurs à contraindre des aspects
Comme chaque personnage a cinq aspects, cela devient rapidement difficile pour vous d’être le seul autour de la table à proposer de contraindre des aspects, principalement parce que cela fait beaucoup de choses à mémoriser et à suivre. Il faut que les joueurs s’investissent aussi et cherchent des opportunités pour contraindre leur propre personnage.
Poser des questions ouvertes est un bon moyen pour installer cette habitude chez vos joueurs. Si vous voyez une opportunité pour contraindre un aspect, au lieu de le proposer directement, posez une question qui le suggère. «Donc, tu es au grand bal royal et tu as l’aspect Ours mal léché. Oli, penses-tu que tout va se passer comme sur des roulettes pour ton personnage ? « Faites travailler un peu vos joueurs sur les complications à venir et distribuez les points Fate.
Rappelez aussi aux joueurs qu’ils peuvent contraindre les aspects des PNJ, s’ils ont connaissance de ces aspects. Posez le même genre de question ouverte quand un de vos PNJ est sur le point de prendre une décision et demandez aux joueurs de remplir les blancs. «Bon, vous savez que le Duc Orsin est Manifestement présomptueux… Vous pensez qu’il va se sortir indemne de cette joute ? Qu’est-ce qui pourrait mal se passer ? Vous êtes prêt à payer un point Fate pour que cela arrive vraiment ?» Votre objectif principal doit être de faire de vos joueurs des partenaires dans la création de jeu, de l’intrigue et de l’intensité dramatique, plutôt que de toujours vous en remettre à vous-même.
Créer les adversaires
Un des boulots les plus importants du MJ est de créer les PNJ qui vont affronter et tenter d’empêcher les PJ d’atteindre leur but au cours des scénarios. Les histoires mémorables se produisent lorsque, pour pouvoir accomplir leurs objectifs, les PJ doivent affronter des adversaires qui en valent le coup : ce qu’ils sont prêts à faire, le prix qu’ils sont prêts à payer, et comment ces expériences les transforment.
En tant que MJ, vous devez viser un certain équilibre avec vos PNJ, les joueurs doivent ressentir de la tension et de l’incertitude, mais il ne faut pas que leur défaite soit inéluctable. Les joueurs doivent en baver pour arriver à leurs fins, mais ils ne doivent pas pour autant perdre espoir.
Voici comment procéder.
Ne prenez que le strict minimum pour survivre
Tout d’abord, gardez bien à l’esprit que vous n’êtes jamais obligé de définir un PNJ de manière aussi détaillée qu’un PJ. La plupart du temps, vous n’aurez pas besoin d’autant d’informations car ils ne sont pas au centre de l’attention, contrairement aux PJ. Il est préférable de ne se concentrer que sur ce dont vous aurez besoin quand ce PNJ rencontrera les PJ, vous pourrez toujours remplir les blancs à la volée (comme peuvent le faire les PJ) s’il s’avère que ce PNJ devient plus important pour la campagne en cours.
Les types de PNJ
Les PNJ peuvent être de différents types : PNJ anonymes, PNJ secondaires et PNJ principaux.
PNJ anonymes
La majorité des PNJ de votre campagne sont anonymes. Des gens tellement insignifiants pour votre histoire qu’on n’a même pas besoin d’apprendre leur nom pour qu’ils puissent interagir avec les PJ. Le marchand du magasin devant lequel on passe par hasard, l’archiviste de la bibliothèque, le troisième client du bar à partir de la gauche, le garde à la porte. Leur rôle dans l’histoire est temporaire et fugace, les PJ les rencontreront sans doute une fois et ne les reverrons jamais. En fait, la plupart du temps, vous allez les créer presque par réflexe quand vous décrivez l’environnement. «La place est magnifique aux alentours de midi, de nombreux clients déambulent de-ci de-là. Il y a un crieur public qui hurle les nouvelles locales d’une voix criante et aiguë.»
Tout seuls, les PNJ anonymes ne sont pas censés représenter un réel défi pour les PJ. Vous les utilisez de la même manière qu’un jet de compétence assez facile, une sorte d’opportunité pour faire briller les PJ. Dans les conflits, leur rôle est de faire diversion ou de gagner du temps, pour forcer les PJ à faire des efforts pour obtenir ce qu’ils veulent. La plupart des aventures pleines d’action sont pleines de super méchants qui ont une armée de sbires à leur côté. Les PNJ anonymes sont ce genre de sbires.
Pour un PNJ anonyme, tout ce dont vous avez besoin se résume à deux ou trois compétences liées à leur rôle dans la scène. Le gars de la sécurité lambda possède Combat et Tir alors que le notaire moyen peut se contenter d’Érudition. Les anonymes n’ont jamais plus d’un ou deux aspects, parce qu’ils ne sont pas assez importants. Ils n’ont qu’une ou deux cases de stress, si même ils en ont, pour absorber les dégâts mentaux et physiques. Pour le dire autrement, ils n’ont aucune chance face aux PJ.
Il existe trois types de PNJ anonymes : moyen, passable et bon.
Moyen
- Rôle : homme de troupe de base, conscrit local ou autre du même acabit. Par défaut, un PNJ anonyme est Moyen.
- But : En général, faire en sorte que le PJ ait l’air impressionnant.
- Aspects : un ou deux.
- Compétences : Une ou deux au niveau Moyen (+1).
- Stress : Pas de jauge de stress - un cran de réussite est suffisant pour les mettre hors-jeu.
Passable
- Rôle : professionnels entraînés, tels des soldats ou des gardes d’élite, ou tous ces personnages un peu expérimentés comme un courtier à la langue bien pendue ou un voleur doué.
- But : Drainer un peu les points des personnages (un ou deux points Fate, cocher une ou deux cases de stress, octroyer une conséquence moyenne).
- Aspects : un ou deux.
- Compétences : Une de niveau de Passable (+2), et une ou deux de niveau Moyen (+1).
- Stress : Une case de stress, deux crans de réussite sont suffisants pour les mettre hors-jeu.
Bon
- Rôle : opposition ardue, surtout s’ils sont nombreux.
- But : comme les PNJ passables, drainer encore plus les points des personnages. Ils fournissent un bon moyen de les ralentir avant une rencontre un peu plus notable.
- Aspects : un ou deux.
- Compétences : Une au niveau Bon (+3), une à Passable (+2) et une ou deux de niveau Moyen (+1).
- Stress : deux cases de stress, trois crans de réussite sont suffisants pour les mettre hors-jeu.
Les sbires
À chaque fois que c’est possible, les PNJ anonymes aiment se regrouper pour former des « meutes ». D’une part, cela augmente leur survie, mais surtout cela réduit la charge de travail du MJ. À toutes fins pratiques, vous pouvez considérer ces sbires comme une personne : à la place de lancer les dés pour chacun des trois gros bras, vous n’avez qu’un jet à faire pour les sbires.
La section Travail en équipe dans le chapitre précédent vous explique comment les sbires peuvent concentrer leurs efforts pour être plus efficaces.
Dégâts et trop-plein
Quand des sbires prennent des dommages, reportez les crans de dégâts en excès pour mettre hors-jeu un des PNJ de la meute sur un autre PNJ, et ainsi de suite. De cette manière, il est tout à fait possible pour un PJ d’éliminer un ensemble de quatre ou cinq (ou plus) sbires anonymes d’un seul coup.
Quand le groupe prend assez de stress pour la réduire à un seul PNJ, essayer de lui faire rejoindre d’autres sbires de la scène, si c’est plausible (si ce n’est pas possible, faites-le fuir, les PNJ anonymes sont doués pour ça).
En prenant la mauvaise ruelle, Landon et Cynere se font agresser par une bande d’une demi-douzaine de voyous des rues par très bien informés.
Ces voyous sont des PNJ anonymes avec des compétences d’Observation et de Combat de niveau Moyen (+1).
Normalement, comme Cynere a Bon (+3) en Observation, elle pourrait agir en premier, mais pour Amandine, les voyous ont l’avantage parce qu’ils les encerclent. En tant que groupe de six, leur observation Moyenne (+1) est augmentée de +5 pour atteindre Fantastique (+6).
Comme ils attaquent, Amandine les sépare en deux groupes de sbires de trois : un pour Landon, un pour Cynere. Les deux attaquent avec un Bon (+3) niveau (compétence de Combat Moyenne avec un +2 pour les deux supports), mais aucune des deux meutes ne touche.
C’est au tour de Cynere. Lucie annonce, «En un clin d’œil, Cynere se saisit de son épée et commence à découper ces minables !» Elle obtient un Excellent (+4) résultat en Combat. Les premiers sbires d’Amandine n’obtiennent qu’un Bon (+3) en défense (0 sur le jet, compétence Moyenne, +2 pour les deux qui aident), donc Cynere inflige un cran de dommage au groupe, suffisamment pour en mettre un hors de combat. Il reste deux autres PNJ, donc leur bonus de groupe ne sera que de +1 pour leur prochaine attaque.
Au tour d’Oli, Landon fait deux crans de dommage aux sbires qu’il affronte, ce qui élimine deux voyous et les réduit à un seul PNJ anonyme.
Les PNJ anonymes en tant qu’obstacles
Une façon encore plus simple de gérer les PNJ anonymes est de les gérer comme des obstacles : indiquez aux PJ une difficulté pour surmonter la menace que représente le PNJ et résolvez le tout en un jet. Vous n’avez rien à noter du coup, donnez juste une difficulté en vous appuyant sur les conseils donnés dans ce chapitre et dans Actions et résultats, et considérez que les PJ se débarrassent des PNJ sur un jet réussi.
Si la situation est plus compliquée que ça, gérez-la comme un défi. Cette astuce est utile si vos sbires sont plus un élément de la scène qu’un véritable groupe d’individus.
Zird veut convaincre un groupe de mages qu’ils sont condamnés, ainsi que le monde, s’ils s’évertuent à continuer leurs recherches sur le Néant Noir. Amandine n’a pas envie de gérer chaque interaction individuellement, elle transforme le tout en un défi contre les sbires mages.
Les différentes étapes du défi sont : établir sa bonne foi (Érudition), semer la zizanie en leur sein (Tromperie) et obtenir leur soumission en les effrayant avec des histoires de destin funeste et ténébreux (Provoquer). Elle choisit une opposition passive Excellente (+4) pour ce défi.
D’abord le PNJ, ensuite le nom
Les PNJ anonymes ne doivent pas forcément rester anonymes. Si un joueur décide de mieux connaître ce barman ou ce crieur public ou ce chef de la sécurité ou qui que ce soit, allez-y et faites en une personne « réelle », mais cela ne veut pas dire qu’il faut forcément les rendre plus complexes en termes de mécanique de jeu. Si vous voulez le faire, pas de problème, et transformez votre PNJ anonyme en PNJ secondaire. Sinon, le simple fait de donner un nom et une motivation à ce courtier ne veut pas dire qu’il ne peut pas être mis hors d’état de nuire en un coup de poing.
Aubergiste (Moyen)
Aspects : Je ne veux pas de problème dans mon établissement
Compétences : Relations à Moyen (+1)
Voyou Entraîné (Passable)
Aspects : Rat des villes, Criminel violent
Compétences : Combat Passable (+2), Physique et Athlétisme Moyen (+1)
Mage du Collège des Arcanes (Bon)
Aspects : Comportement hautain, Dévoué aux arts des arcanes
Compétences : Bonne (+3) Érudition, Passable (+2) Tromperie, Volonté et Empathie Moyen (+1)
PNJ secondaires
Les PNJ secondaires ont un vrai nom et sont un peu plus détaillés que les PNJ anonymes, ils ont un rôle de support dans le scénario. Ils sont souvent affublés d’un trait remarquable qui les distingue du reste de la foule, que cela soit leur relation avec un PNJ ou un PJ, une compétence particulière, une habilité unique, ou simplement le fait d’apparaître souvent dans l’histoire. Beaucoup d’aventures mettent en jeu un personnage de « lieutenant » faisant office de bras droit du grand méchant ; c’est un PNJ secondaire en termes de jeu. Les visages que vous associez aux lieux que vous inventez pendant la création du cadre sont aussi des PNJ secondaires, ainsi que tout PNJ qui est nommé dans l’un des aspects des PJ. Les PNJ secondaires amènent beaucoup d’intensité dramatique sous forme d’interaction entre les personnages, étant généralement les personnages avec qui les PJ ont des relations, telles que les amis, les acolytes, la famille, les relations et les ennemis notables. Bien qu’ils ne soient jamais au centre des intrigues principales d’un scénario, ils comptent pour beaucoup dans l’histoire, soit parce qu’ils apportent de l’aide, parce qu’ils posent problème ou parce qu’ils sont au centre d’une intrigue secondaire.
Les PNJ secondaires sont construits de la même manière que les PNJ anonymes, mais avec encore un peu plus de tout ce qui fait un personnage. Ils ont un concept, un problème, un ou plusieurs aspects additionnels, une prouesse et les deux jauges de stress standards de 2 cases chacune. Ils ont aussi une poignée de compétence (de quatre à six). Si leurs compétences leur donnent des cases supplémentaires de stress, tenez-en compte. Ils ont une conséquence légère et, si vous voulez qu’ils soient particulièrement résistants, vous pouvez leur ajouter une conséquence modérée.
Les compétences d’un PNJ secondaire sont généralement distribuées en colonnes. Comme vous n’allez définir que quatre ou cinq compétences, faites-en une colonne. Si votre PNJ possède une compétence au niveau Bon, ajoutez une compétence pour chaque rang positif inférieur à Bon. Au final, une compétence au niveau Bon, une passable et une Moyenne.
- Niveau des compétences : Les compétences d’un PNJ secondaire peuvent excéder le niveau des compétences de vos PJ d’un ou deux rangs mais seulement si leur rôle dans l’histoire est d’apporter une solide opposition. Les PNJ secondaires qui sont des alliés devraient avoir un niveau relativement équivalent à celui des personnages des joueurs. (Un autre classique des aventures héroïques est que le « lieutenant » du grand méchant soit plus fort que lui au combat, le méchant étant plus le cerveau du crime.)
- Concéder : Les PNJ secondaires ne devraient pas se battre jusqu’à la mort s’ils ont le choix. Faites-leur plutôt concéder la victoire dans les conflits, surtout si on est au début de l’histoire, et surtout si la concession est quelque chose du genre « Ils s’en vont ». Concéder de cette manière a plusieurs avantages. D’une part, cela donne un avant-goût de la prochaine confrontation avec eux, qui sera sans doute plus sérieuse. Le fait de concéder permet aussi de donner des points Fate à ceux qui concèdent, cela garanti aussi qu’ils seront plus dangereux la prochaine fois qu’on les rencontrera. D’autre part, vous êtes à peu près sûr que les PJ seront des plus satisfaits de les retrouver plus tard. «Ah, Landon, nous nous retrouvons enfin ! Mais cette fois cela ne se passera pas aussi bien pour toi…» Enfin, cela montre aussi aux joueurs que lorsque les choses sont désespérées, concéder lors d’un conflit est une option tout à fait valable. Si un PJ concède de temps à autre, cela va doucement augmenter la mise et introduire de nouvelles complications, ce qui mène à une histoire plus intense d’un point de vue de l’engagement et de la dramatique.
Le vieux Finn, mentor de Landon
Aspects : Capitaine de la milice de Vinfeld à la retraite, Trop vieux pour ces conneries, Mentor de Landon
Compétences : Excellent (+4) Tir, Bon (+3) Combat, passable (+2) Volonté, Athlétisme Moyen (+1)
Prouesses : Tacticien. Peut utiliser Combat pour créer un avantage dans les situations tactiques à grande échelle.
Teran le rapide, voleur extraordinaire
Aspects : Pickpocket et vaurien, Je ne peux pas m’en empêcher
Compétences : Formidable (+5) Cambriolage, Excellente (+4) Discrétion, Bonne (+3) Érudition, Combat Passable (+2), Physique Moyen (+1) [Note : 3 cases de stress physique]
Prouesse : Infiltré. +2 en Discrétion dans les bâtiments citadins
Og le balaise
Aspects : Og casse tout !, Og pas très malin.
Compétences : Fantastique (+6) Combat, Formidable (+5) Physique [Note : 4 cases de stress physique, 1 conséquence légère supplémentaire pour les conflits physiques], Excellent (+4) Athlétisme
Prouesse : aucune
PNJ principaux
Les PNJ principaux sont ce qui ressemble le plus aux PJ. Ils ont une feuille de personnage complète, comme celle des PJ, avec cinq aspects, un jeu de compétences complet et une sélection de prouesses. Ce sont les personnages les plus importants dans la vie des PJ, car ce sont les forces essentielles auxquelles ils seront opposés ainsi que les alliés les plus précieux. De par leurs gammes d’aspects, ils offrent aussi les plus grandes variations possible en termes d’interaction et d’opportunité pour invoquer ou contraindre un aspect. Le « Grand Méchant » principal de votre scénario ou de votre arc narratif devrait toujours être un PNJ principal, tout comme les PNJ qui sont les pièces essentielles de vos histoires.
Bien sûr, vous pouvez aussi promouvoir un de vos PNJ secondaires au statut de PNJ principal. C’est une très bonne option si le PNJ est graduellement ou rapidement devenu, grâce aux joueurs, un élément moteur de l’histoire, en dépit de vos plans initiaux.
Comme les PNJ principaux ont les mêmes informations sur leur feuille que les PJ, ils vont vous demander plus d’attention et de temps de préparation que les autres PNJ. La manière de les créer dépend vraiment du temps dont vous disposez. Si vous le voulez, vous pouvez utiliser la même procédure que celle pour créer le personnage d’un joueur et passer par toutes les étapes décrites précédemment, en laissant quelques champs de la feuille de personnage ouverts, pour amener quelques surprises en jeu.
Vous pouvez aussi élaborer vos PNJ principaux au fil de l’eau, pendant le jeu, en fonction des besoins, en commençant par remplir partiellement les parties de la feuille de personnage dont vous êtes sûr, telles les compétences dont ils ont absolument besoin et les prouesses qui sont nécessaires. Remplissez le reste au fur et à mesure. C’est presque comme pour faire un PNJ, sauf que vous pouvez ajouter des choses à la feuille de personnage au cours du jeu.
Les PNJ principaux se battent jusqu’au bout si besoin est, ce qui forcera les PJ à batailler ferme.
En ce qui concerne les compétences, vos PNJ principaux sont souvent de deux types, ceux de valeur égale à celle des PNJ, s’améliorant aussi au fil de la campagne, ou ceux supérieurs aux PJ mais en restant à ce niveau alors que les PJ progressent doucement pour arriver un jour à les battre. Dans le premier cas, donnez-leur la même distribution de compétences qu’aux PJ. Dans le deuxième cas, donnez-leur assez de compétences pour avoir des niveaux au moins supérieurs de deux rangs au niveau maximum actuel des PJ (cf. Le plafond des compétences).
Ainsi, si les PJ culminent pour l’instant à Excellent (+4), votre grand méchant principal devrait avoir une paire de compétences Fantastiques (+6) en colonne, ou une pyramide de compétences qui atteint Fantastique.
De même, un PNJ particulièrement important pourrait avoir plus de cinq aspects pour mettre en valeur son importance dans l’histoire.
Barathar, Reine des contrebandiers des Contrées de Sindral
Aspects :
Reine des contrebandiers des Contrées de Sindral
Un équipage plutôt loyal
Les remords sont pour les mauviettes
«Zird, vas-tu mourir à la fin ?»
Mon bateau, le Marchand de Mort Un harem de gros bras J’ai la loi dans ma poche
Compétences :
Fantastique (+6) Tromperie et Combat
Formidable (+5) Tir et Cambriolage
Excellent (+4) Ressources et Volonté
Bon (+3) Relations et Observation
Passable (+2) Métiers et Discrétion
Moyen (+1) Érudition et Physique
Stress : 3 cases physiques, 4 cases mentales
Prouesses :
- Menteuse chronique : peut utiliser Tromperie à la place d’Empathie pour créer un avantage dans les situations sociales.
- Maître des feintes : +2 pour utiliser Tromperie pour créer un avantage dans un conflit physique.
- Riposte : Si vous réussissez avec style votre défense lors d’un jet de Combat, vous pouvez infliger un dégât de 2 crans plutôt que de gagner un coup de pouce.
Jouer les adversaires
Voici quelques conseils pour bien utiliser les adversaires que vous créez.
La bonne taille
Souvenez-vous qu’il faut trouver un équilibre entre l’oblitération des PJ et les laisser écraser leurs adversaires (à moins que cela ne soit une horde de figurants, et dans ce cas c’est un peu leur raison d’être). Il est important de garder à l’esprit que les compétences des PNJ ne sont pas tout, leur nombre et leur importance sont aussi déterminants.
Trouver ce bon compromis pour les adversaires est plus un art qu’une science, mais voici quelques stratégies qui pourront vous aider.
- Ne surpassez pas en nombre les PJ à moins que les PNJ n’aient vraiment un niveau de compétence bien inférieur.
- Si les PJ vont se regrouper pour attaquer un adversaire important, faites en sorte que cet adversaire ait des compétences deux niveaux plus hauts que la meilleure compétence que les PJ pourront utiliser dans la scène.
- Limitez-vous à un PNJ principal par scène, à moins que cela soit le conflit majeur de la fin d’un arc. Souvenez-vous que les PNJ secondaires peuvent avoir des compétences du niveau que vous souhaitez.
- La majeure partie des adversaires rencontrés par les PJ lors d’une session doivent être des PNJ anonymes, avec un ou deux PNJ secondaires et un PNJ principal en cours de route.
- Les PNJ anonymes et secondaires sont synonymes de conflits plus courts parce qu’ils concèdent ou perdent plus rapidement alors que des PNJ principaux allongent les conflits.
Créer des avantages pour les PNJ
Il est facile de tomber dans le mode par défaut consistant à utiliser les adversaires comme un moyen direct de gêner les PJ, enchaînant conflit sur conflit jusqu’à ce qu’un des partis soit défait.
Cependant, souvenez-vous que les PNJ peuvent créer des avantages de la même manière que les PJ. N’hésitez pas à utiliser les adversaires pour créer des scènes où le but n’est pas nécessairement d’empêcher les PJ d’atteindre leur objectif, mais plutôt de se renseigner sur eux et d’empiler les invocations gratuites pour plus tard. Si vos méchants et les PJ prennent le thé ensemble, faites quelques jets d’Empathie. Ou si une confrontation se déroule dans une allée sombre, les PNJ peuvent venir, jauger les PJ quelques instants, et repartir en fuyant.
De même, n’oubliez pas que les PNJ peuvent avoir l’avantage du terrain dans les conflits où ce sont les PJ qui vont à leur rencontre. Quand vous mettez en place les aspects de situation, vous pouvez donner à vos PNJ quelques invocations gratuites d’avance s’il vous paraît raisonnable qu’ils aient eu le temps de mettre en place ces aspects. Utilisez cette astuce en toute bonne foi cependant, deux ou trois aspects de ce genre, c’est la limite supérieure.
Changer la forme du conflit
Les oppositions que vous allez mettre en place seront beaucoup plus intéressantes si elles s’attaquent aux PJ de plusieurs façons possibles plutôt que de toujours utiliser la voie la plus directe. Souvenez-vous qu’il y existe de nombreuses manières de nuire à quelqu’un, et que les conflits mentaux sont tout aussi pertinents que les conflits physiques. Si les adversaires ont un éventail de compétences très différent de celui des PJ, multipliez leur impact en choisissant une stratégie de conflit qui leur donne le plus gros avantage.
Par exemple, quelqu’un qui en veut à Landon ne va probablement pas le confronter physiquement, car Combat et Athlétisme sont ses meilleures compétences. Par contre, il n’est pas aussi fort pour percer à jour les duperies et les tromperies, ou pour gérer une attaque magique contre son esprit. Zird, par contre, est vulnérable aux gros costauds vicieux, ceux qui peuvent le frapper avant qu’il n’ait eu le temps d’utiliser sa magie.